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(Essai)

De la recherche des classes à la politique

Samedi 16 décembre 2017 — Dernier ajout vendredi 15 décembre 2017

Le débat sur la nation de classes et la lutte des classes est trop récurent pour ne pas tenter d’y répondre une fois pour toute, ou du moins pour évaluer certains de ses enjeux.

La période est marquée par une nouvelle phase de dispute entre des partisans qui s’étiquettent de la lutte des classes et d’autres qui proposent certaines transformations de cette approche

En fait, la notion de classe proposée par Marx est attachée au mode de production, pas à la sociologie ; Et si les forces productives ne définissent en rien les classes, elles pèsent sur leurs rapports, par l’usage ou mésusage qui sont fait d’elles au titre du mode de production.

Définir les classes ? Trivial !

Le livre « Le capital » ne commence pas par la recherche des classes, mais par la question de la production des biens et services et la loi de leurs échanges. Et finalement, dans l’ensemble des 3 tomes, les classes sont à peine esquissées. Certains en font parfois reproche à Marx. Ils ne mesurent pas qu’aucun approfondissement n’est nécessaire à la compréhension du mode de production et des classes.

Le premier acteur humain qui apparait dans le livre 1 est le capitaliste. Il entend produire une marchandise pour faire profit, c’est-à -dire créer un bien ou un service possédant une valeur accrue par rapport au capital initial. Le second acteur, la force de travail, intervient au titre du hasard du contexte historique qui a fait d’elle une possible marchandise, ayant une valeur (d’achat pour que son propriétaire la reproduise) et une valeur d’usage (un temps de capacité de travail).

Le mode de production est dès lors défini. « La production elle-même est dominée par le capital et fondée sur le travail libre et la séparation du radicale du travailleur des moyens de production ». Et ce processus repose sur deux classes dont l’une possède le capital qui commande le travail, et l’autre est séparée radicalement des moyens de production.

Il n’est pas utile d’en savoir, d’en comprendre plus. Dès lors le surtravail, sa transformation en capital supplémentaire, l’exploitation jusqu’au processus historique du développement du capital peuvent-être saisis. Qu’importe de savoir ce que fait cette force de travail, qui elle est, comment elle vit de son salaire ! Marx traite du travail industriel parce que le travail le plus typique alors de ce mode de production est celui de l’industrie naissante.

Mais, ici et là , Marx cite l’enseignant, ceux qui encadrent ou pensent le travail, participent à la comptabilité comme des forces de travail, à comprendre en tant que telles, exploitées, au titre d’un immense travailleur collectif productif. Il les cite rapidement pour mettre en garde soit contre une conception étriquée, sociologique, du prolétariat, soit contre quelques risques de divisions de celui-ci. Mais fondamentalement, pour la compréhension du mode de production et l’identification des classes, ces aspects socio-professionnels ne sont pas nécessaires à prendre en compte. Le concept d’exploitation ne renvoie qu’à une chose : un rapport ! Soit de temps de travail, soit de valeurs dans une stricte équivalence… La nature des moyens de travail n’intervient finalement que dans l’évolution historique des contradictions systémiques, du point de vue de la finalité du mode de production et l’aiguisement du conflit de classes.

Les révolutions techniques ne changent jamais le périmètre des classes même si le travail change concrètement, donc avec lui les métiers, les qualifications, les conditions de travail… De même, le poids relatif des activités prises en charge par ce mode de production peut changer du fait du mouvement des forces productives et de l’évolution des besoins sociaux, mais ce qui fonde d’un côté le prolétariat et de l’autre le capital ne change en rien. Le capital a vocation et moyens d’éliminer tous les autres modes de production existants ou concurrents parce qu’il ne cesse de révolutionner les forces productives et de socialiser (au sens de faire travailler sur un même objet de travail) à une échelle considérables les efforts de travail de hommes en leur fournissant d’immenses moyens de production parce qu’il concentre parce qu’il concentre « naturellement » - au titre du fonctionnement du mode de production -, le capital, le travail mort qui peut saisir le vif.

Tant que dure le mode de production du capital, toutes les forces de travail ont en commun de se vendre pour seulement se reproduire et se revendre sans fin en tant que marchandise, c’est-à -dire offrir une valeur d’usage pour une certaine valeur d’échange. Cela suffit à définir la classe du « prolétariat ». Cela suffit à définir la classe du « prolétariat » et du « capital » (la bourgeoisie), en tout temps et toute époque du règne du mode de production capital. .

Le capitaliste se définit comme un producteur de capital en soi, et le capital comme une forme abstraite de propriété puisqu’elle transforme sans cesse son rôle et sa forme durant le cycle économique (Livre II du capital).

Le capitaliste ne reproduit pas seulement son capital initial et un revenu, mais aussi un capital supplémentaire. La classe capitaliste regroupe les propriétaires de capitaux qui se veulent productifs de capital. D’autres acteurs sociaux existent par ailleurs, mais ils ne comptent qu’à la marge pour ce qui concerne la production de la richesse sociale…

Pour prendre parti de classe, il faut simplement apprendre les rouages du mode production et s’approprier le mouvement des forces productives. « Il faut avant tout boire, manger, se loger, s’habiller et quelques autres choses encore. Le premier fait historique est donc la production des moyens permettant de satisfaire ces besoins ». « On doit par conséquent étudier et élaborer sans cesse l’histoire des hommes en liaison avec l’histoire de l’industrie et des échanges » . Il faut cesser de considérer que l’histoire et donc la politique commencent en classant les hommes. L’identification des classes et de compréhension de la nature de la lutte des classes est ainsi la conclusion d’un effort de connaissance du mode de production ; pas le fruit d’un travail en-lui-même sur des groupes sociaux.

Que faire ?

Les classes de Marx sont plus abstraites que les réalités que partagent des individus concrets dans leur trajectoires réelles. Mais elles rendent bien mieux comptent du filet social qui enserrent chacun tandis que les réalités sociales des individus peuvent leur masquer la réalité de ce filet jusqu’à un certain point.

Pour prendre une image, tous les hommes d’une même classe sont déterminés comme les particules le sont par les lois de la mécaniques quantiques ! Chacun peut avoir sa trajectoire. Certains peuvent même en avoir de très improbables. Mais il est probable qu’elles suivent, dans leur masse, plutôt certaines d’entre elles plutôt que d’autres. Au final, au niveau de la classe, l’analyse scientifique offre de quoi prédire suffisamment précisément la voie qui caractérisera la vie de la masse de ceux appartenant au Prolétariat ou au capital. Elle dit des trajectoires de vie, pas des consciences…

Les comportements, lieu et mode de vie identifiants des groupes sociaux ne disent pas de leur conscience de classes !

La conscience de classe s’exprime, s’évalue à travers la nature des exigences qu’un individu ou un groupe, expriment, au regard de ses intérêts de classe et dont il n’a pas forcément très conscience.

Se revendiquer des communs ne dit rien du rapport au capitalisme ou au communisme. Il dit de la conscience du besoin de gérer les ressources afin que chacun puisse assurer durablement la production de ses conditions d’existence. Une telle prise de position ne dit pas la nature capitaliste ou communiste de l’usage de ces ressources. Les alpages suisses sont souvent communs, pas le bétail y paissant. Idem dans les traditionnelles gestions de l’eau dans les zones arides d’agriculture… Et cela vaut pour les communs scientifiques technologiques, à commencer par l’algorithme de la division euclidienne, les liens hypertextes…

La conscience de classe se reconstruit, ou se déconstruit sans cesse, car sans cesse la société et le travail évoluant et les générations se succédant n’ont donc pas les mêmes trajectoires de vie et de travail. Chaque individu vivra sa vie avant de vivre la vie de sa classe, mais faire politique devra se faire à partir de ce que vivra dans sa masse la classe pour laquelle on prend parti.

Par essence, un des premiers objectifs d’un parti communiste est de se faire parti de masses parmi le prolétariat. Non pas souci de se prolétariser mais pour traiter, dans un même mouvement, le plus finement possible, les besoins immédiats et le devenir de cette classe. Rien à voir avec une quelconque volonté d’instrumentaliser des bras et des jambes, voire des cerveaux. Le numérique et son intelligence artificielle ne permettra pas de court-circuiter cette exigence. Il s’agit d’être présent en masse pour que chaque génération de prolétaires puisse découvrir ses intérêts de classe au cours de sa trajectoire de vie, donc lire Marx dans le texte autant que possible, en tout cas d’avoir l’occasion de débattre du mode de production et de ses deux classes et d’avoir la vision du mouvement des forces productives.

La prise de parti pour le prolétariat a besoin de transmettre sans fin son expérience politique, non pour se fossiliser mais pour que le terreau ne se dessèche pas et qu’il enrichisse les trajectoires de vie des générations successives de communistes. Changer ou pas de nom n’est jamais anodin au regard de ce besoin. Ce n’est jamais affaire de nostalgie.

Pour le reste, la prise de parti pour les exploités par la classe du capital, est question de conscience. Engels fut un capitaliste de naissance et toute sa vie. Marx naquit grand bourgeois et fut un homme d’une immense culture académique. Ils furent de grands communistes et ils n’ont guère nuit au mouvement « ouvrier ». Au contraire, la discrimination entre réformisme, proudhonisme, communisme primitif et avancé et la perception de l’enjeu d’une autonomie idéologique et organisationnelle furent mieux perçus grâce à eux.

De l’éternel retour du débat sur les « classes »

Le mouvement « ouvrier », n’a jamais réussi totalement à s’abstraire d’un besoin de donner quelques couleurs sociologiques à sa lutte des classes. A sa décharge, les besoins sociaux ont toujours quelques aspects subjectifs. La division sociale du travail et même les expériences de luttes n’en finissent pas de structurer et déstructurer des identités diverses, sources de richesses et de divisions. Certaines figures ont tendance à devenir des étendards toujours plus faciles à porter que le travail de masse et de formation politique. Tout comme le raccourci des slogans peut sembler plus convaincant que le débat quotidien et argumenté. Ainsi, le « mouvement » ouvrier confond depuis trop longtemps, encore aujourd’hui, prolétariat, classe ouvrière et ouvriers, classes (catégories) populaires et ouvriers etc. Et dans le travail concret, capitalistes et cadres, exploiteurs et manageurs… Et finalement, la compréhension du concept de classes peut se déliter au fil des transformations du travail si le prolétaire, en permanence, ne se ressource plus à l’analyse du mode de production et n’étudie plus le mouvement des forces productives. Alors toute les dérives sociales-démocrates ou sectaires sont possibles.

Ensuite, le monde intellectuel est plutôt enclin à lui expliquer l’homme, avec un grand H et ses valeurs, en décrivant l’homme avec un petit h, aux comportements les plus divers…. Les élites de droite et de gauche organisent de fait, plus ou moins en concurrence idéologique, des classements, des catégories qui rajoutent à la cacophonie : classes moyennes, supérieures, travailleurs intellectuels et manuels, nationaux et immigrés.

Désormais les classes ou catégories proposées reposent souvent sur une opposition binaire : Outsiders/Insiders ! (Dominés et dominants, productivistes et écologistes, partisans des communs et de l’accaparation, de la modernité et du passé, 1% et 99%). Sans doute pour faire plus classe que nature !

Actuellement, le petit producteur indépendant, l’ambitieux libertaire, le petit affairiste de l’économie libérée du numérique ou l’écolo-bio des grandes métropoles peuvent ainsi aux yeux de certains faire classe commune, au moins cause commune, avec la classe des exclus, des catégories populaires contre les 1%. Le petit actionnaire est ainsi parfois fait solidaire du salarié actionnaire. Certaines parlent « d’alliance de classe de familles prédatrices » contre les peuples auxquelles il faudrait opposer « un communisme qui recréé de ‘’l’en-commun ‘’ » : les concepts mous permettent sans fin de gloser quand les concepts scientifiques font gagner du temps et en lucidité ! Dans tout cela, tout le monde, ou personne, peut-être le chef d’orchestre ! Au profit de quelques ambitieux ou de tyran à la grecque. Tout est « horizontal », donc démocratique…

Dans de telles visions du monde, les plus pauvres des prolétaires sont dits plus exploités que les prolétaires plus aisés ! Les PDG et autres cadres supérieurs du privé sont faits soit nouvelle oligarchie, soit potentiellement nouvelle classe révolutionnaire (Le débat initié autour du « cadrisme »).

Bien évidemment, les approches des inégalités, de la pauvreté, des discriminations, des dominations, des grands défis de société, sont légitimes, nécessaires et utiles pour comprendre la société des hommes, leurs comportements, leurs besoins, et fixer de concrets et immédiats objectifs politiques, sociaux, sociétaux à la lutte des classes. Mais ne considérer que cela, rétrécit cette lutte à un combat pour un meilleur partage des richesses, à plus de justice, d’égalité - à proprement considéré à plus d’équité - contre une aristocratie oligarchique, au nom parfois d’intérêts supérieurs d’une humanité désincarnée, mais toujours en dehors du mode de production existant.

Alors, bien que faite au nom d’une « certaine lutte des classes », la politique ne traite plus de la production des richesses sociales et du monde mais de leurs consommations. L’enjeu n’est pas le mode de production mais le partage de la capacité à consommer. Les multiples propositions de salaires à vie, jusqu’à celle de B. Friot, sont à classer dans cette catégorie ! Elles ne sont que des mises à jour des pratiques romaines « du pain et des jeux » pour le peuple de Rome grâce au tribut payé par les pays conquis ou du revenu des 1re Poor Laws (1601) d’un Royaume Uni où les doux moutons mangeaient les hommes .

Ainsi considérée, la lutte des classes ne ferait finalement donc pas plus révolution que toute autre révolte ou révolution de palais ! Pourquoi faudrait-il alors lui donner l’importance qu’elle revendique au titre du XIXe et jusque dans les années 1980 ?! Certains s’autorisent même, à peu de frais, à lui reprocher sans fin une étroitesse qu’elle n’a pas, une incapacité à rassembler autant que nécessaire alors, qu’au contraire, elle définit précisément les forces les plus décisives pour la production de la richesse sociale et leurs intérêts fondamentaux.

Redéfinir la lutte des classes à travers de nouvelles classes ou d’autres finalités est ainsi devenu peu à peu une possible démarche novatrice de reconstruction de la perspective révolutionnaire ! C’est surtout tourner le dos à l’analyse du mode de production qui définit les classes et la lutte des classes à lui consacrer.

Mais qui peut nier qu’il faut sortir de l’économie carbonée et fermer les paradis fiscaux, faire de la finance son ennemie, reconstruire une industrie etc ? Soit. Mais qu’est-ce qui permettra de remonter un jour jusqu’à la source d’où jaillit sans fin une masse de richesses qui s’accumule dans quelques mains, carbone, paradis fiscal, finance ou pas ? Car avant que cette manne existe, faut-il qu’elle soit produite quelque part, d’une quelconque manière…

Qu’est ce qui aidera à comprendre que le ruissèlement de la richesse des riches promis par Macron ne ruissèlera pas plus sur les derniers de cordée du XXI siècle pas plus que celui promis aux ouvriers par A. Smith en son temps.

Faire usage des classes de Marx

La volonté de rompre avec la lutte des classes au sens de Marx, entend faire oublier définitivement le besoin d’articuler des objectifs concrets, à portée immédiate sur la société, dans les difficultés et les formes qui sont les siennes dans l’instant, avec des réformes structurantes introduisant, autant que possible et nécessaire, des éléments communistes au niveau du mode de production.

En France, le mouvement « ouvrier » s’est réellement attaché totalement à cette articulation en 3 occasions seulement : La Commune, le Front populaire, et lors du CNR… Même en 1968, il n’y parvint pas et en 1981, la rupture du programme commun en avait précédemment court-circuité largement toute possibilité durable et véritable.

Commençons par reprendre véritablement maille avec le mode de production du capital ! Nous devrions y retrouver assez vite les classes tant perdues et tant recherchées.

Faisons l’analyse de la machine de la révolution numérique et de son intelligence artificielle. Nous mesurerons assez vite en quoi elle pèsera sur le rapport social et la société de par l’usage que voudra fatalement en faire le capital… Nous prendrons du même coup le prolétariat tel qu’il sera, comme Marx le fit en son temps quand la machine était de l’ordre du rouet et déjà de quelques réseaux intercontinentaux de communications électromagnétiques.

Nous redécouvrirons que le mode production définit une lutte des classes non à 2, mais à 3 , entre le capital, le prolétariat et ce qui reste des producteurs libres, indépendant et autres professions libérales ou protégées. Il conviendra aussi de prendre en compte le monde des arts, de la culture, des intellectuels aux intérêts singuliers. Mais en dernière analyse, seules deux classes ont l’avenir du mode de production dans leurs mains.

Cette mise au point traite du besoin de penser les classes et l’organisation révolutionnaire à partir du mode de production. Elle ne règle pas la question du rassemblement avec d’autres. Cette question est d’une autre nature et relève d’autres enjeux. Autrement dit, cette mise au point entend aussi que la grande cause du rassemblement cesse d’être instrumentalisée contre les classes de Marx et leur lutte des classes.

Dans le document joint, vous trouverez ce texte et quelques notes mentionnées non ici . La mise en page peut être légèrement différenteL’adresse originale de cet article est http://lepcf.fr/De-la-recherche-des...

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