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Henri MARTIN mérite un hommage national du PCF

Jeudi 19 février 2015

Madame, Monsieur,

Veuillez trouver, ci-dessous, le courrier que je viens d’adresser à Pierre Laurent, secrétaire national du Parti communiste Français après la disparition d’Henri Martin.

Cordialement

André GERIN

Cher Pierre,

Henri Martin vient de nous quitter. Je propose de lui rendre un hommage national, avec les représentants du gouvernement du Vietnam. Il n’avait pas son pareil pour mêler les engagements pour le communisme et la libération des peuples de l’impérialisme.

Henri Martin était un grand dirigeant du PCF. Ses prises de position éclairées l’ont conduit à être mis à l’écart des grandes décisions stratégiques. Il s’était inscrit dans la dissidence depuis le congrès de Martigues en Mars 2000.

Dans son livre qui mérite d’être popularisé : « Quelques souvenirs du siècle passé » aux éditions « Le temps des cerises », il était de ceux qui désacralisaient la Révolution de 1917, sans cracher dans la soupe, ce qui n’était pas le cas de Robert Hue.

Henri Martin refusait la mutation annoncée. Elle a servi d’alibi pour abandonner les idéaux du PCF dans l’histoire du 20e siècle. Il refusait, à juste titre, que les communistes français soient « des témoins complaisants » des crimes commis en Union-Soviétique.

Pour lui être fidèle, je tiens à rappeler sa déclaration du 8 juillet 2002, parue dans le journal l’Humanité :

« Sous hégémonie sociale-démocrate par Henri Martin »

La première leçon de l’élection présidentielle, c’est la condamnation du bilan de la gauche plurielle par l’électorat populaire. Condamnation confirmée par les législatives. Donc aussi la condamnation de l’activité du PCF depuis 1997 par la majorité de son électorat d’alors. Une grande partie s’est abstenu, ou a voté extrême gauche, parce qu’il a estimé que son parti s’était conduit « comme un gérant loyal des intérêts du capital ». Il serait nécessaire que la direction prenne acte de ce fait objectif : le Parti a été assimilé à la social-démocratie par son électorat. La direction peut toujours prétendre que son électorat se trompe, mais dans ce cas il faudrait qu’elle soit capable de changer le peuple pour continuer. En tout cas, celui-ci a très bien vu que nous n’avons pas mené une campagne communiste, mais la campagne de la gauche plurielle, celle d’un gouvernement placé sous l’hégémonie de la social-démocratie. Celle-ci, naturellement, fait appliquer son programme de collaboration de classe à un point tel que les trois quarts des Français n’ont pas vu de différence entre le programme du candidat Jospin et celui du candidat Chirac. Là aussi, il faudrait dire que les Français n’ont pas compris ? Mais cette concordance est soulignée par les décisions prises en commun lors des sommets européens et allant toutes dans le sens des intérêts du grand capital européen et international.

Nicolas Marchand faisait remarquer, dans l’Humanité du 25 avril : « Nous ne nous sommes pas déterminés en permanence du point de vue des intérêts populaires, mais du point de vue de notre participation au gouvernement. » C’est cette politique gouvernementale méprisant les revendications populaires qui a favorisé la présence de Le Pen au second tour. Cette grave conséquence souligne l’urgence, pour le Parti, de se démarquer de cette politique, et de changer avec sa pratique d’union de sommet qui en fait le transforme en supplétif du PS. Malheureusement pour les intérêts des travailleurs, ce n’est pas l’orientation que prend la direction du PCF. Au Conseil national du 23 avril, Marie-George Buffet a en effet déclaré : « Je ne pense pas, pour ce qui me concerne, qu’il faille incriminer les orientations de notre campagne… Je pense que l’essentiel de notre démarche était juste. » Marie-George Buffet avance comme explication : « Aucune force révolutionnaire nulle part dans le monde n’a encore réussi à se relever de l’effondrement de la perspective historique ouverte par la révolution d’Octobre. C’est dans les ruines (…) que nous sommes (…) en train de chercher et de construire. » Mais le PS n’est pas concerné par l’écroulement de l’URSS, et pourtant il recule, comme il avait déjà reculé en 1993 pour ne pas avoir tenu ses promesses. Il faut, à l’évidence, rechercher ailleurs les raisons de notre effondrement à 3,37 %.

Le combat essentiel à mener est un combat anticapitaliste clair, le PCF a été constitué pour cela et avait grandi dans ce combat. Il s’appuyait résolument sur la défense des intérêts des travailleurs en leur montrant la nécessité de l’union pour triompher. Mais une union à la base ! C’est seulement lorsque celle-ci est constituée et que les masses se mobilisent que l’on peut obtenir des accords avec la social-démocratie pouvant aider, partiellement, les travailleurs. Mais ces accords ne doivent jamais mettre en cause l’indépendance totale du Parti. Ce qui n’a pas été le cas dans notre participation au gouvernement : au nom de la solidarité gouvernementale, nous nous sommes alignés totalement sur la ligne sociale-démocrate de celui-ci. En fait, le socle d’avancées essentielles du congrès de Martigues était de faire de notre participation gouvernementale une question stratégique : dans les faits, ce fut d’ailleurs notre seule stratégie (…). Il a contribué à faire passer la présence au gouvernement avant l’action concrète et permanente avec les travailleurs. En même temps, il développa sous tous les tons la formule : « Ecouter les gens », en passant sous silence le rôle de l’idéologie dominante imprégnant les consciences de ces mêmes gens. D’autant plus que, au nom d’être « moderne », le congrès continuait à ridiculiser notre théorie. Il glosait sur la disparition de la classe ouvrière, dont Pierre Mauroy dut rappeler l’existence à Lionel Jospin, quinze jours avant la défaite de celui-ci.

Tout se passe comme si la direction ne croyait plus à une société non capitaliste et s’installait dans une gestion de gauche. Elle a fait plus que suivre le PS : elle a expliqué à nos électeurs inquiets, puis critiques, que la politique du gouvernement était bonne pour eux, comme lors des privatisations, en transformant celles-ci en bouffée d’oxygène pour les entreprises. En même temps, elle a supprimé la formation des cadres ouvriers. Le résultat est que, avec la participation communiste, le bilan du gouvernement depuis 1997 a été le renforcement du régime capitaliste avec des privatisations supplémentaires, avec des traités européens entravant tout progrès social, avec des profits supplémentaires énormes pour le grand capital. Sans parler de l’inféodation totale à la politique des USA de dominer le monde par la force. Ce renforcement du régime capitaliste est un fait que chacun peut constater. Pourtant, jusqu’ici, la direction continue à le passer sous silence avec, pour conséquence, d’aggraver la méfiance des couches populaires à son égard. Cela permet aussi de comprendre pourquoi la majorité des électeurs nous ont abandonnés, ainsi que des dizaines de milliers d’adhérents. Ne faisons donc pas semblant de chercher d’autres raisons, surtout pas en redoublant de « frénésie autodestructrice de notre histoire », comme l’écrit Léo Figuères (l’Huma du 15 mai).

Proposons aux citoyens de toutes opinions politiques de se donner des droits nouveaux pour régler eux-mêmes les grands problèmes qui les concernent. Une minorité de personnes se donne le droit de décider contre l’avis d’une énorme majorité. Pour que cette majorité puisse faire triompher son point de vue, elle est amenée à réfléchir à la nécessité de démocratiser l’élaboration du budget de la France (…). Proposons donc que, un an à l’avance, les grandes lignes de recettes et de dépenses proposées par le gouvernement soient soumises à la discussion de tous les citoyens (…). (De même), cette majorité de Français peut créer un rapport de forces permettant de renationaliser les entreprises concernées (par les licenciements boursiers) et de les gérer démocratiquement. Pour avoir les moyens financiers de le faire, on peut créer un grand pôle financier public (…) et constituer des comités de contrôle sur l’utilisation des fonds publics qui seront affectés à ces entreprises, avec la participation des citoyens habitant les lieux où se trouvent les entreprises (…). Le peuple est donc mis complètement à l’écart des décisions qui, pourtant, le concernent en premier. Les conceptions nouvelles qui viennent d’être développées sont donc un pas en avant pour lui donner plus de pouvoir. Elles sont conformes à une vraie démocratie. Elles sont modernes, car elles brisent le trop long règne des féodalités financières.

Henri martin poursuit, dans la conclusion de son livre : sur le rôle indépendant du PCF.

Malheureusement, je crois que depuis 2002, la vie lui a donné raison.

Reçois, Cher Pierre, mes fraternelles salutations.

André GERIN

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