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L’expérience Vénissiane du rassemblement et du parti

Martes 7 de abril de 2015 — Última actualización Miércoles 8 de abril de 2015

En creusant l’écart sur la droite par rapport à 2014 et même à 2008, et en contenant le FN, en pleine vague bleu et bleu marine aux départementales, Vénissieux a fait l’évènement. Les acteurs de l’agglomération Lyonnaise ne s’y trompent pas, les communistes en premier lieu bien sûr [1], mais aussi tous ceux qui avaient misé sur la chute de la dernière grande ville communiste hors région parisienne.

Dans quelle mesure cette campagne et son résultat peuvent être utiles pour les communistes au plan national ? Quelles leçons peut-on tirer de cette victoire ?

Car si la direction nationale du parti et l’Humanité ont bien sûr fait écho à cette victoire, c’est sans jamais noter qu’elle a été obtenue dans une ville dont les communistes ont très majoritairement voté contre les orientations des dernières congrès et mettent en œuvre, malgré les pressions nombreuses, une orientation politique qui ne s’inscrit pas dans le «Front de Gauche».

Pourtant l’Humanité n’a pas considéré que cela valait la peine d’un reportage approfondi. C’était déjà le cas l’an dernier ou le «journal fondé par Jean Jaurès» s’était contenté de quelques lignes…

Bien sûr, il serait stupide de considérer que cette victoire est la conséquence directe de l’orientation politique de la section PCF de Vénissieux, mais il serait tout aussi stupide de considérer qu’elle n’a aucun rapport. Comme toujours, c’est l’analyse de l’expérience concrète qui doit guider les communistes.

Il faut donc dire brièvement comment cette campagne a été conduite, quelles forces ont été mobilisées, et comment ont discuté et agi les communistes Vénissians, ce qui permet ensuite de chercher à en tirer quelques enseignements.

Les conditions de la victoire Vénissiane

Vénissieux est souvent présenté comme un bastion rouge, mais il faut rappeler que le député y avait été perdu en 1981, avant d’être regagné en 1993 par André Gerin qui avait fait face en 2001 à une bataille municipale difficile ne réalisant que 41% au premier tour dans une liste d’union de la gauche. Quand il passe la main en 2009 à Michèle Picard, l’enjeu est de taille compte tenu de sa stature politique nationale reconnue après 4 députations. Il est presque logique que le parti socialiste tente en 2014 de prendre la ville. Mais il ne peut le faire en se présentant comme le rassembleur. D’abord parce que contrairement à d’autres villes, la droite est bien décidée à tenter sa chance dans l’espoir de cette vague bleue attendue, mais surtout parce que les communistes à Vénissieux sont tout sauf repliés sur eux-mêmes et ont multiplié les efforts pour rassembler toujours plus largement autour du projet de ville. Le plus facile était bien sûr d’associer le parti de gauche et le MRC, mais le plus symbolique est l’accord avec les Verts qui avaient conduit des listes d’opposition en 2001 (liste «citoyenne») et 2008 (avec le modem). Cet accord est sans doute possible en 2014 parce que depuis 2008, Vénissieux a mis en œuvre l’orientation initiée par André Gerin proposant en 2008 de relever le «défi écologique». Depuis, la ville est reconnue dans toute l’agglomération et ailleurs pour ses réalisations et actions sur la biodiversité, l’énergie, l’environnement, pour son agenda 21.

Les communistes peuvent donc proposer à toutes les forces progressistes un rassemblement sur un contenu clair et connu de tous, issu d’un travail citoyen permanent avec les conseils de quartier, le conseil citoyen du développement humain durable… Et les propositions du parti socialiste pour infléchir ce projet ne rencontrent absolument aucun écho. Car il y a bien eu discussion avec le parti socialiste. Personne n’a défini par avance le cadre politique du rassemblement nécessaire. C’est le projet et les conditions de sa mise en œuvre qui comptent. Collectif anti-libéraux, Front de Gauche, Chantiers d’espoir… ici, rien ne vient corseter le rassemblement, et personne ne peut venir s’imposer comme décideur sous prétexte qu’il représente telle ou telle organisation.

Cette situation hérite aussi de l’échec des tentatives de créer un «Front de Gauche», sur des bases anti-communistes. Ces dernières années, certains avaient tenté une «association du Front de Gauche» sans la section PCF, suivis avec intérêt par de nombreux anti-communistes et servant à quelques ambitions personnelles… La vie a tranché. Ce «Front de Gauche» s’est dissous, certains, malheureusement anciens communistes, menant même bataille en 2014 contre la liste conduite par Michèle Picard pour finir en 2015… deuxième de liste du parti socialiste !

La liste conduite par Michèle Picard est donc une liste de large rassemblement, comme dans de nombreuses villes communistes, avec des personnalités socialistes, républicaines, qui rejoignent d’abord et avant tout le travail réalisé, le projet. Elle est possible parce que les relations avec les autres forces politiques se font dans le respect de chacun et sans préoccupations autres que la ville. Le rassemblement n’a pas pour objectif de préparer les prochaines présidentielles. Cela peut surprendre, mais les relations avec le parti de gauche dans la ville sont excellentes.

La liste est constituée de 24 communistes, 5 personnalités présentées par le PCF, 5 EELV, 5 PG, 1 PRG, 1 MRC, 3 personnalités socialistes, 5 autres personnalités. Autrement dit, la place du parti communiste est reconnue, par son travail militant comme par le travail de ses élus. Les 35 élus de la liste sont 20 PCF et 3 apparentés, 4 PG, 3 EELV, 3 socialistes, 2 personnalités.

Les communistes jouent bien sûr un rôle important pour l’organisation de la campagne, mais ils diffusent aussi leur propre matériel, dont le journal le Vénissian en Janvier, journal qui donne le ton contre la droite et l’austérité. Le PG comme les verts ont aussi leur propre matériel, qui est diffusé avec celui de la liste. Les Verts organisent un meeting avec Emmanuelle Cosse sur le thème de leur choix (la rénovation énergétique). Les partis ne disparaissent pas dans le rassemblement, et personne ne cherche à le transformer en un «mouvement» qu’il faudrait organiser, et qui aurait mission de représenter le peuple. Chaque force joue son rôle et construit son identité politique.

Dans cette bataille, les communistes se renforcent [2],notamment en terme de cadres potentiels. Des militants se révèlent, prennent des responsabilités, et un des résultats indirects de la campagne, est de remettre à jour l’organisation du parti en cellules…

La campagne est bien sûr conduite par Michèle Picard, en lien avec toutes les forces de la liste, qui s’expriment à plusieurs reprises, mais elle exprime aussi le rassemblement à travers des témoignages citoyens de non candidats, militants bien sûr, mais aussi personnes engagées à leur manière pour l’école, l’emploi, la culture…

Les tâches matérielles sont bien partagées. Les candidats notamment étant au premier rang des portes à portes, diffusions, marchés, rencontres… pendant que la tête de liste multiplie les rencontres d’appartements.

L’agressivité de la droite et du parti socialiste,leurs pratiques populistes, leur propagande calomnieuses et diffamatoires, l’irrespect du code électoral, conduit à resserrer les liens personnels et politiques dans la campagne. Le rassemblement dont certains pouvaient penser début 2014 qu’il pouvait être opportuniste se révèle comme une nouvelle époque de la vie politique Vénissiane, avec une nouvelle génération d’élus et de militants, tout comme Michèle Picard en conquérant une légitimité politique renforcée ouvre une nouvelle ère de la longue histoire de cette ville communiste.

Sur cette base, quels enseignements peut-pn tirer de cette histoire Vénissiane ?

Le rassemblement populaire peut se faire sans le Front de Gauche, mais pas sans le parti communiste

C’est le premier constat. Les communistes Vénissians n’ont jamais parlé du Front de Gauche dans la ville, ils n’ont rien fait contre non plus, et ceux qui ont voulu le faire vivre se sont heurtés à une réalité… sans les forces militantes communistes, le Front de Gauche est marginal, et à la merci des arrivistes et des querelles de personnes.

Par contre, les communistes Vénissians rassemblent, dans les luttes comme la bataille contre les expulsions ou pour l’usine Veninov, et dans leurs batailles politiques; élections municipales, bataille contre la métropole, solidarité avec le Dombass, Gaza… Ils rassemblent sans préalable mais sur un contenu, dans la transparence, sans imposer de cadre global lié à des accords d’appareils.

Ce rassemblement n’a pas vocation a être une organisation, et n’a donc pas besoin de dirigeants. Pour mener une lutte, un comité de coordination peut être utile, mais il repose non sur les appareils, mais sur les forces militantes présentes dans cette lutte. Les forces organisées jouent leur rôle et chacun peut s’inscrire dans les initiatives à sa manière, y compris individuellement, comme ces habitants qui invitaient Michèle Picard chez eux.

Il faut noter que cette pratique d’un rassemblement qui n’a pas besoin du Front de Gauche n’a posé aucun problème aux communistes des autres villes venu aider dans la campagne.

Le rassemblement ne s’oppose pas à la visibilité du vote communiste

Beaucoup de communistes s’interrogent après les élections départementales. Malgré la perte de 54 élus, conduisant à l’absence d’élus dans 30 départements de plus, le résultat dans le contexte d’une vague à droite a des aspects positifs. Pour la première fois, le PS ne nous entraine pas complètement dans sa chute, et c’est surtout la réforme électorale et le redécoupage des cantons qui nous coute cher en élus. Pourtant, il est difficile de rendre «visible» ce résultat, bien sûr parce que les médias le cachent, mais aussi parce que nos candidats l’étaient sous des étiquettes diverses, dans des «couples» variés… Au comité départemental du Rhône, une camarade disait «nos candidats devraient toujours être désignés Front de Gauche», je lui faisais remarquer que pour la visibilité, on pourrait aussi les désigner toujours «PCF»…

A Vénissieux, aucun doute. Michèle Picard n’est pas une élue «Front de Gauche», ni «rassemblement Vénissian». C’est une élue PCF à la tête d’une liste de large rassemblement pour tenir le cap à gauche. Tout le monde l’a compris et c’est le PCF tout entier qui en tire bénéfice dans le Rhône !

Le rassemblement a besoin de l’organisation, donc du parti communiste !

Le rassemblement est mis à l’épreuve dans les batailles et notamment dans une campagne électorale aussi mouvementée que celles que nous connaissons dans nos villes désormais, avec des forces qui n’hésitent pas à utiliser les voyous, comme au bon vieux temps du SAC…

Le pourrissement de la vie politique, de la vie tout court avec le poids des trafics et des réseaux, du communautarisme et des intégrismes, nécessite de suivre avec attention ce qui se passe, ce qui se dit, et réagir après une vraie réflexion politique pour «tenir le cap» qu’on s’est fixé. A Vénissieux, il fallait tout faire pour mener le combat contre la droite et le FN sans se laisser entrainer dans les polémiques avec le PS. C’est là que l’organisation du parti communiste est irremplaçable, et que de sa qualité dépend la force du rassemblement. Bien sûr, les autres forces politiques ont leur organisation, et peuvent contribuer à l’efficacité collective, mais l’expérience montre que ce sont bien les communistes qui sont la cheville ouvrière du rassemblement.

C’est d’ailleurs une des leçons fortes des conséquences de la mutation et des stratégies de mouvement dans lequel le parti se fond. Quand l’organisation du parti s’affaiblit, ce sont ses capacités de rassemblement qui s’affaiblissent.

Le rassemblement a besoin d’un parti communiste clairement porteur de ses propres choix politiques !

Le parti communiste n’apporte pas que son organisation, même si elle joue un rôle clé. Il apporte sa capacité à porter un projet politique au service de l’unité du peuple. Quand tant de questions divisent les catégories sociales, les origines, les quartiers, les opposent parfois violemment, il ne suffit pas de s’exclamer «tous ensemble», ou d’affirmer le «vivre ensemble», même si c’est nécessaire. Il faut aussi travailler les arguments qui aident les militants à affronter ces divisions du peuple et à dépasser ces divisions dans le rassemblement.

A Vénissieux, le parti socialiste a tenté d’opposer le quartier des Minguettes aux autres quartiers de la ville en faisant jouer la «victimisation». La droite a dénoncé le pseudo ’bétonnage" de la ville. Le PS a pourtant pris une claque et la droite a été battue, parce que les communistes depuis des années expliquent et convainquent autour du refus du guetto, de la nécessité de constructions variées, en locatif social, mais aussi en accession, en immeubles comme en habitat individuel, de l’importance de partir de la réponse aux besoins sociaux. La bataille d’idées est essentielle et elle ne peut se limiter à la bataille municipale autour des projets de la ville. Toutes les questions locales renvoient à des questions globales et donc à la guerre idéologique contre les services publics et pour la concurrence.

Être capable de faire le lien entre des questions concrètes et la guerre idéologique est un rôle essentiel du parti communiste. C’est ce qui conditionne le progrès du mouvement populaire pour se libérer des idées dominantes. D’autres peuvent y contribuer, mais un parti communiste fier de son histoire et de son projet joue un rôle irremplaçable pour donner confiance aux acteurs du rassemblement.

Ces quelques idées de portée générale tirée de l’expérience Vénissiane confortent ce qui avait été dit par le réseau «Faire Vivre et Renforcer le PCF» lors du dernier congrès. Il est urgent de faire un bilan réel des stratégies suivies depuis 15 ans par le PCF, et de tenir compte de cette résistance de terrain qui doit tout aux communistes et à notre peuple et qui pourrait être confortée et amplifiée par une orientation politique claire, lisible, affirmant l’urgence du combat populaire de résistance à l’austérité, la nécessité de s’organiser pour un affrontement de longue durée avec les oligarchies capitalistes, affirmant donc la priorité au renforcement d’un parti communiste de combat au service du rassemblement populaire.

[1de nombreux militants de l’agglomération avaient d’ailleurs apporté leur aide pour la campagne

[2sans doute aussi d’autres car rien ne vaut une belle bataille pour faire progresser une organisation !

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