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Un maire communiste sans avenir ?

Le PCF n’a pas d’avenir : préservons sa mémoire
Vendredi 4 septembre 2009 — Dernier ajout lundi 13 avril 2020

Une interview éclairante d’un maire élu comme communiste qui pense que le parti communiste n’a plus d’avenir, et qui se réfugie dans l’idéalisme des valeurs, tout en évoquant la lutte contre les injustices…

Nous avons envie de lui dire comme Brecht le fait dire à Lénine…

ne t’en va pas encore, il reste des exploiteurs

et tant qu’existe l’exploitation, il faut se battre contre elle

les faibles ne se battent pas

les plus forts peut-être une heure se battront

ceux qui sont encore plus forts se battent des années

mais les plus forts de tous luttent toute leur vie

ceux là sont indispensables


Stéphane Gatignon est, depuis 2001, maire communiste de Sevran. Cette commune de Seine-Saint-Denis est une des villes les plus pauvres de France. Dans le deuxième volet de cette interview, Stéphane Gatignon revient sur les liens très forts qui unissent gaullisme et communisme. S’il tient aux idées du PCF, et qu’il les défend, il s’est résigné à tirer un trait sur son avenir.

Reversus : Comment expliquez-vous la présence quasi continue du Parti Communiste Français en Île-de-France depuis cinquante ans ?

Il y a bien eu un partage politique qui s’est formé mais les communistes n’ont pas décidé sciemment de s’occuper des cités, c’est beaucoup plus complexe que cela. Pour l’Etat et pour les gens de droite, les communistes représentaient une sorte de sécurité. Les communistes symbolisaient le contrôle social des quartiers et de la classe ouvrière.

C’est paradoxal mais, ce paradoxe, on le retrouve des deux cotés puisqu’à l’époque, l’Union Soviétique appelle également à voter pour la droite. En 1981, Brejnev dit préférer Valéry Giscard d’Estaing à François Mitterrand. N’oublions pas cette toile de fond : il y a un accord diplomatique sous-jacent.

Dans les banlieues, les communistes gèrent une sorte de contre-société, qui permet à l’autre société de vivre tranquillement. Tout est très structuré, entre les jeunesses communistes, le Parti, les syndicats, les amicales de locataires. Donc oui effectivement, il y a un partage entre gaullistes et communistes, un partage qui date de la guerre.

Avec le Conseil National de la Résistance…

Oui, il y a la Résistance mais il ne faut pas oublier non plus 1940. Dès cette date, on retrouve les gaullistes d’un coté et les communistes de l’autre, qui, pour beaucoup, sont d’ailleurs en prison dès 1939.

Beaucoup de grandes figures du communisme français dont Charles Tillon rejoignent la Résistance contre l’avis du Parti, et ce dès 1940. Par opposition, beaucoup de dirigeants de Vichy dont Pierre Laval ou Marcel Déat sont issus du monde socialiste et de la droite traditionnelle.

De la même manière, on peut dire que le gaullisme n’est pas la droite mais une forme particulière de la droite. C’est ce qui explique cette étroite relation entre le gaullisme et le communisme, qui perdure longtemps après la guerre. N’oublions pas non plus que si Maurice Thorez rentre de Moscou en 1944, c’est grâce à un accord tacite entre Staline et de Gaulle. Staline autorise Thorez à rentrer, à condition qu’il ne prenne pas le pouvoir en France. Le fondement de ce partage politique est donc déjà prégnant.

On se rend également compte à travers cet exemple du rôle ambigu et complexe du PCUS. De la même manière, lorsque l’on analyse les directives du parti communiste soviétique donné au KPD (Parti communiste allemand et second parti communiste au monde à l’époque) durant l’époque weimarienne, c’est assez troublant. Les soviétiques ont laissé sciemment le nazisme s’installer et progresser.

Oui car pour le parti communiste soviétique, le principal ennemi restait la social-démocratie. Les assassinats de Karl Liebknecht et de Rosa Luxemburg étaient dans tous les esprits. L’objectif était de détruire le SPD avec l’idée que les ouvriers se tourneraient ensuite naturellement vers le Parti communiste. En France, c’est l’après-guerre qui est déterminant. On a beaucoup caricaturé le personnage de Maurice Thorez, on a affirmé à tort qu’il avait une vision très prosoviétique. Mais lorsque l’on analyse la façon dont il prend le pouvoir au sein du PC dans les années 30, on observe la victoire d’une vision très franco-française.

Au départ, les soviétiques ne veulent pas de Thorez. Ils lui préfèrent Jacques Doriot. Mais ce dernier choisit de ne pas aller à Moscou alors qu’il était vraisemblablement sur le point d’être désigné nouveau secrétaire du PCF. Au contraire, Maurice Thorez comprend l’importance de ce déplacement et se décide à s’y rendre. C’est ce qui motive la décision du Politburo de l’investir. Tout cela pour dire, que cette vision franco-française de Thorez va bien s’imbriquer avec le gaullisme.

Tout cette relation gaullisme/communisme existe jusqu’à la fin des années 70. Après la crise pétrolière, tout cela explose avec une perte d’influence grandissante du Parti Communiste Français. En fait, le Parti continuait à se tenir à l’idée qu’un autre monde était possible. Lorsque l’URSS s’effondre, d’abord avec la guerre en Afghanistan entre 1979 et 1989, le PCF sombre.

Le Parti Communiste français a eu du mal à s’émanciper de sa filiation originelle avec le PCUS.

Pourtant le Parti Communiste Français dans les années 70 abandonne le modèle soviétique et adopte la ligne de l’Eurocommunisme. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le PCF progresse durant les années 70 avec l’abandon d’une partie du dogme soviétique, notamment concernant la «  dictature du prolétariat ».

Oui mais si l’on analyse le positionnement de Georges Marchais, on se dit que le décrochage est quand même très tardif.

Attendez, ça ne se passe pas du tout comme cela ! Marchais est un personnage aux multiples facettes, il y a plusieurs périodes. Au départ, il se place dans la lignée de Waldeck Rochet. C’est lui qui monte l’Eurocommunisme. Il tire les autres pays, notamment l’Espagne et l’Italie avec Enrico Berlinguer, dans cette mouvance. Il y a donc une rupture avec Moscou. Il reste sur cette position jusqu’à l’invasion en Afghanistan en 1979.

Oui, jusqu’à la fameuse visite à Moscou…

Effectivement, il y rencontre Brejnev en janvier 1980. Il faut rappeler qu’il s’agit aussi d’une des conséquences du désengagement du PCF lors du printemps de Prague en 1968. Les communistes français avaient désapprouvé l’invasion des chars soviétiques. A Moscou, ils reprennent donc Georges Marchais en main sur plusieurs points, sur la doctrine d’abord, et sur son passé chez Messerschmitt ensuite.

Son absence de passé de résistant…

En effet, Georges Marchais n’a pas de passé de résistant et c’est tout le problème. Il est important de comprendre que, dans le monde communiste, la question de la Résistance reste un thème fondamental. Nous l’avons déjà évoqué, le lien avec les gaullistes date de cette période et cela permet de comprendre beaucoup de choses.

Le Parti Communiste Français pourra t-il un jour retrouver son lustre d’antan selon vous ? Non, c’est fini tout cela.

Mais quel avenir pour le PC alors ? Il n’y a pas d’avenir.

Mais vous n’êtes pas communiste, pourtant ?

Je suis communiste puisque je crois en certaines valeurs héritées de cette idéologie. Je crois en l’héritage communiste. Quand je raconte tout cela, je perpétue la mémoire du PCF, celle de la Résistance, de la lutte pour l’indépendance ; mais je prends aussi en compte les contradictions inhérentes à son histoire, notamment la relation complexe avec l’URSS et les questions du trotskisme et du stalinisme. Mais malgré ces contradictions, je pense que cet héritage mérite encore d’être porté pour changer notre société.

Mais pour porter des idées, on a besoin d’un parti. Vous devez sans doute retrouver certaines de ces valeurs dans le Front de gauche par exemple ?

Non, je crois qu’être communiste aujourd’hui c’est surtout avoir une certaine vision de la société. En partant de ce postulat, je pense que les dirigeants communistes actuels ne sont plus communistes.

Je pense qu’être communiste désormais, c’est évoquer une nouvelle société en tenant compte des enjeux écologiques, sociaux qui sont posés. Pour revenir à ce à quoi nous sommes confrontés, on observe qu’aujourd’hui, la métropole parisienne est l’une des plus inégalitaires d’Europe. Les déséquilibres Est/Ouest ne cessent de s’accentuer. Les gens de droite et de gauche n’ont vraiment aucune vision de ce que doit être la métropole de demain. La question du cosmopolitisme est essentielle et elle est trop souvent oblitérée…

Lundi 10 Août 2009

Tiré de l’hebdomadaire Marianne (10 août 2009)

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Vos réactions

  • Franchement, les affirmations historiques de Stéphane Gatignon sont pour le moins discutables. Je ne partage pas le soi disant partage de la société entre gaullistes et communistes qui auraient en quelque sorte été les gendarmes de la classe ouvrière ! C’est oublier plusieurs grandes périodes de luttes sociales, les batailles anti coloniales…Tout cela pour conclure à la fin du PCF et à un communisme quelque peu évanescent. Quel est l’intérêt de faire connaître cet interview ? Marie-Christine Burricand

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