Après avoir battu Le Pen, adhérez au parti communiste pour vous donner de la force face à Macron !
« La jeunesse socialiste se bat dans le ghetto »

Marek Edelman (1er janvier 1919 – 2 octobre 2009)

commandant de l’insurrection du ghetto de Varsovie
Mercredi 2 décembre 2009 — Dernier ajout lundi 24 août 2020

texte reçu par mail, et qui me semble à faire connaitre

Evoquer, au lendemain de la disparition du dernier commandant des révoltés du ghetto de Varsovie, « l’histoire de la lutte contre le communisme » [1], n’est-ce pas donner raison à Mark Twain ? « La vérité est ce que nous avons de plus précieux. Il faut l’économiser ».

Qu’on en juge :

« Le soir, a lieu l’appel du premier mai. Brefs discours. L’Internationale. Le monde entier fête cette journée. Dans le monde entier, à la même heure, sont prononcées les mêmes paroles puissantes. Mais, jamais encore, l’Internationale n’a été chantée dans des conditions aussi tragiques, dans un lieu où un peuple est mort et n’en finit pas de mourir. Ces mots et ce chant dont les ruines enfumées renvoient l’écho témoignent que la jeunesse socialiste se bat dans le ghetto et qu’elle ne les oublie pas face à la mort » [2]

Les autres camarades ne furent pas en reste avec eux :

« Il en fut de même à Vilna et à Lodz notamment » [3]

C’est ainsi que les rouges-gorges du Yiddishland purent en remontrer aux corbeaux qui volaient lourdement sur nos plaines :

"Le 1er mai 1943, un groupe d’écrivains et de poètes juifs se réunirent dans le ghetto de Vilnius pour une soirée consacrée au "Printemps de la Littérature Yiddish". L’insurrection du ghetto de Varsovie faisait toujours rage et l’esprit de la bataille en cours planait sur la réunion. A cette occasion, le poète Shmaryahu Kaczerginski rencontra son confrère Hirsh Glik, et apprit que celui-ci avait écrit un nouveau poème. Ils se retrouvèrent le lendemain matin. "Maintenant écoute attentivement, je vais te le chanter", dit Glik. Kaczerginski se souvient : "Il commença d’une voix douce, mais avec beaucoup d’exaltation. Ses yeux étincelaient. Notre heure viendrait. Où puisait-il sa foi ? Sa voix devint plus forte. Son pied battait la mesure, comme s’il marchait au pas. Le texte que Hirsh Glik chanta en ce matin de mai – "Zog Nit Keynmol" - devait se répandre à une vitesse incroyable par les ghettos et les camps, et devenir un symbole d’espoir et de défi. Rapidement adopté par les partisans juifs, on le connaît parfois sous le titre "Le Chant des Partisans", comme une inspiration à combattre pour les Juifs qui le pouvaient, ou du moins à survivre, pour ceux qui ne le pouvaient pas" [4]

Comment ne pas se souvenir des visages et des noms de ceux qui furent désignés à la vindicte publique par les auteurs de l’Affiche rouge ?

« Nous n’étions que quelques centaines de garçons, avec quelques pistolets et des grenades, nous n’étions pas en mesure de lutter contre une armée régulière ».

« Les jeunes avaient appris à se servir de pistolets, à poser des mines, c’est tout. Nous étions organisés en groupes de dix personnes et dans chaque pâté d’immeubles, il y avait quatre ou cinq groupes. Nous n’avions pas de grades » [5]

Le citoyen Edelman a bien mérité de l’Organisation juive de combat (OJC), en isolant le syndrome de Massada :

« Un chef n’a pas le droit de se suicider. Il doit se battre jusqu’au bout. D’autant qu’il était possible de fuir le ghetto, malgré les barrages. La preuve, c’est que nous sommes quinze à être parvenus à prendre la fuite. L’idée du suicide collectif n’est pas venue d’Anielewicz, mais de Jurek Wilner. Peu de temps auparavant, Jurek était revenu d’une mission dans un camp de concentration. Se faisant passer pour un Aryen, il y avait néanmoins vécu des choses atroces et avait failli perdre l’usage de ses jambes. Sans l’aide d’Henryk Grabowski, un socialiste polonais qui finançait la résistance juive, il serait mort en déportation. Jurek était diminué physiquement et moralement. Lorsqu’est arrivé le moment le plus difficile, il n’a pas vu d’autre issue que la mort ».

« Ceux qui ne se sont pas soulevés sont tout autant des héros que ceux qui ont pris les armes. Celui qui a choisi de ne pas laisser sa mère monter seule dans les convois de la mort a fait preuve d’autant d’héroïsme que celui qui est mort les armes à la main ».

« En nous soulevant, nous avons rappelé notre appartenance au genre humain. En prenant les armes contre ceux qui voulaient nous anéantir, nous nous sommes raccrochés à la vie et nous sommes devenus des hommes libres. La meilleure preuve en est que beaucoup de combattants de l’OJC ont pu fuir le ghetto après la bataille. Ceux qui sont tombés par la suite, c’est en combattant avec les partisans polonais ».

« L’OJC avait informé Ignacy Szwarcbart [dirigeant sioniste et député polonais en exil] et le gouvernement polonais de Londres. Le Mossad savait aussi ce qui se passait ici. Ses agents se sont pourtant contentés d’évacuer les gens disposant d’argent, et encore, jamais pendant la guerre et uniquement vers la Palestine. Le fondement de l’idéologie de Ben Gourion et des siens, c’était la rupture avec la diaspora [juive]. Il en était arrivé à refuser de s’exprimer dans sa langue maternelle, le yiddish [langue germanique mêlée de slavismes et d’hébraïsmes], la langue des 11 millions de Juifs d’Europe et d’Amérique ».

« Si Israël a été créé, c’est grâce à un accord passé entre la Grande-Bretagne, les Etats-Unis et l’URSS. Pas pour expier les 6 millions de Juifs assassinés en Europe, mais pour se partager des comptoirs au Moyen-Orient ».

« De quel peuple juif parle-t-on ? Aujourd’hui, Israël est un Etat culturellement arabe. Israël s’est coupé de Yitzkhok Leybush Peretz [écrivain et poète yiddish, 1852-1915], de Chagall, du yiddish. Israël s’est créé sur la destruction de cette immense culture juive multiséculaire qui s’était épanouie entre la Vistule et le Don. La culture israélienne, ce n’est pas la culture juive. Quand on a voulu vivre au milieu de millions d’Arabes, on doit se mêler à eux et laisser l’assimilation, le métissage, faire son œuvre ».

« Nos armes n’ont jamais été tournées contre une population civile sans défense. Nous n’avons jamais tué de femmes ni d’enfants » [6]

Mais il y a d’autres symptômes, et ce qu’ils révèlent :

« Les bundistes n’attendaient pas le Messie, et ils n’avaient pas l’intention d’émigrer en Palestine. Ils se considéraient comme polonais, et ils combattaient pour la justice et le socialisme en Pologne, où chaque nationalité aurait sa propre autonomie culturelle, et où les droits des minorités seraient garantis ».

« J’en appelle aux dirigeants du monde libre : n’arrêtez ni les bombardements aériens, ni l’envoi de troupes au Kosovo, pour que ce dont j’ai été le témoin dans le ghetto de Varsovie ne se renouvelle pas. Dans la situation actuelle, seule la présence des soldats de l’OTAN peut sauver les Albanais du génocide. Je connais la douleur de ceux qui envoient leurs soldats à la guerre, bien qu’ils sachent que ceux-ci peuvent mourir. Mais je connais aussi le prix de la liberté, comme tous ceux de ma génération. C’est le prix que nous avons à payer » Diapozytyw, Adam Mickiewicz Institute, avr. 1999, trad. angl. (US) OB.

Rassurons-nous, il n’y a pas de malédiction sur les socialistes :

"L’OTAN, menée par l’impérialisme américain, a lancé une guerre contre la Yougoslavie. Pour justifier cette attaque, Slobodan MiloseviÄ a été décrit comme "le nouvel Hitler", en laissant de côté quelques petites différences. Ces dernières années, des manifestations énormes ont défilé contre MiloseviÄ en Yougoslavie, même pendant les semaines de la guerre elle-même. Je ne me souviens pas que quelque chose de similaire se soit produit dans l’Allemagne nazie. Hitler était à la tête de la seconde puissance industrielle du monde, et ses énormes forces militaires occupaient pratiquement toute l’Europe. MiloseviÄ n’a même pas réussi à imposer sa volonté aux petites nations de Yougoslavie qui se sont rebellées contre la Serbie – la Croatie, la Slovénie, la Bosnie et la Macédoine. Le budget militaire de la Serbie est égal à 1 % de celui des Etats-Unis, ou 0,5 % de celui des 19 alliés de l’OTAN. C’est là que nous voyons le requin de l’impérialisme US déclarer : "Vous avez vu cette sardine ? Elle me menace !" [7]

Enfin, Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht nous ont enseigné qu’on peut mieux faire en matière d’internationalisme :

"L’action de l’OTAN est dictée par :

  1. la nécessité d’éviter une nouvelle vague de réfugiés, de sans-papiers, sur les pays d’Europe occidentale ;
  2. la nécessité d’éviter l’éclatement d’une guerre entre les membres de l’OTAN lui-même (Grèce, Turquie, Hongrie, pour le repartage des Balkans) ;
  3. le besoin d’assurer la stabilité dans la région des Balkans en vue de la construction de pipelines pour acheminer le gaz et le pétrole découverts dans la région de la mer Caspienne.

Comment assurer cet ordre ? Par le déchaînement de la fureur technologique du capitalisme décadent sur la Serbie ; par l’envoi de missiles et le bombardement des villes et des populations civiles pour démolir la capacité militaire de la Serbie et terroriser la population de ce pays. Cela aussi, c’est la logique meurtrière du capitalisme. Au Kosovo et en Serbie, nous voyons les deux faces du capitalisme décadent : la logique du génocide et la logique de la destruction technologique des villes et de leurs populations. Chacun de ces types de mort de masse trouve son origine dans la deuxième guerre mondiale : le premier dans les opérations des Einsatzgruppen nazis dans les forêts de Biélorussie et dans les villes de Lituanie et de Lettonie ; le deuxième, dans le bombardement de villes comme Hambourg, Leipzig et Dresde par les Alliés anglais et américains. Ces deux types de mort de masse - à une autre échelle - sont la réalité monstrueuse de la guerre au Kosovo. Et cela, ce n’est qu’un avertissement pour notre avenir au sein du capitalisme décadent" [8]

Oliver Buchardt

[1Déclaration du ministre des Affaires étrangères, 3 oct. 2009.

[2Marek Edelman, Hanna Krall, Mémoires du ghetto de Varsovie, un dirigeant de l’insurrection raconte, préf. Pierre Vidal-Naquet, trad. polon. et textes ann. Pierre Li et Maryna Ochab, éd. Scribe, 1983, p. 59.

[3Henri Minczeles, Histoire générale du Bund, un mouvement révolutionnaire juif, éd. Austral, Paris, 1995, p. 502, note 24.

[4I. Gutman, dir., Encyclopaedia of the Holocaust, Macmillan Publishing Co., New York, 1990 ; M. Gilbert, The Holocaust – The Jewish Tragedy, W. Collins Sons & Co. Ltd, London, 1986 ; trad. angl. (US et GB) OB.

[5Le témoignage de Marek Edelman, l’Humanité, 17 avr. 1993.

[6Eilat Nadav, L’insurgé perpétuel, Yediot Aharonot, trad. hébr. Courrier international, n° 806, 13 avr. 2006.

[7Tony Cliff, Un monde à gagner, XII, Tournés vers l’avenir, trad. angl. (GB) JM Guerlin, 1998.

[8Mac Intosh, L’ordre capitaliste règne au Kosovo, Perspective internationaliste, n° 36, hiver 2000.

Documents à télécharger

Revenir en haut