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« A propos de classe ouvrière » (suite)

Le dimanche 3 février 2008

Bonjour chères et chers camarades,

Mon coup de gueule, provoqué par un papier de l’Huma du 16-1, m’a valu un abondant courrier auquel je n’ai pas les moyens de faire face. Les réactions qui me sont parvenues peuvent se classer en quelques grandes catégories :

  • ceux qui lisent Marx dans le texte original, en anglais et en allemand, et qui montrent comment la traduction en franà§ais a pu alimenter une conception étroite de la classe ouvrière ;
  • ceux qui, intéressés, invitent à poursuivre la réflexion ;
  • ceux que mon coup de gueule soulage, même si certain(e)s font état de divergences sur tel aspect particulier ;
  • enfin, ceux qui ont compris autre chose que ce que je souhaitais exprimer, et qui sont la preuve que je n’ai pas été aussi limpide que je pouvais le souhaiter.

En remerciant toutes celles et ceux qui ont pris temps de me faire connaître leur point de vue, et en m’excusant de n’avoir pas les moyens de donner une suite personnalisée à chacun, je vais essayer d’être plus clair.

1. Pour qu’il puisse y avoir communication, il faut d’abord une compréhension commune des mots. Quand l’Huma publie un article de 2 pages parsemé d’allusions à Marx et au marxisme, utilisant la locution « rôle historique de la classe ouvrière », notion marxiste s’il en est, il me semble qu’on est fondé à penser qu’on a affaire à un texte utilisant le concept marxiste de classe ouvrière.

Or ce n’est pas le cas. Ce que l’Huma oppose à la classe ouvrière de Marx, c’est la catégorie sociale ouvrier, celle de l’Insee, c’est-à -dire une conception ouvriériste de la classe ouvrière.

On peut le regretter, mais la lecture ouvriériste du marxisme eut son heure de gloire dans le PCF (et ailleurs). Elle m’a marqué comme elle a marqué d’autres communistes. Apparemment, elle a laissé des traces.

2. Il n’est peut-être pas inutile de revenir sur ce qu’est une classe pour les marxistes : un vaste groupe d’humains qui se détermine en fonction de la faà§on dont ils obtiennent leurs moyens de subsistance : perà§oivent-ils un salaire ou un profit, une rente ; pour cela, doivent-ils ou non travailler ; enfin, sont-ils propriétaires des moyens de production ou de leur seule force de travail.

3. Marx et Engels utilisent plus souvent le mot « prolétariat » que la locution « classe ouvrière ». Dans le texte même du « Manifeste du parti communiste » (exclusion faite des notes et des préfaces), prolétariat est utilisé 58 fois et classe ouvrière 12 fois. S’agissant des classes, ils écrivent : « Cependant, le caractère distinctif de notre époque, de l’époque de la bourgeoisie, est d’avoir simplifié les antagonismes de classes. La société se divise de plus en deux vastes camps ennemis, en deux grandes classes diamétralement opposées : la bourgeoisie et le prolétariat. » (K. Marx et F. Engels, Manifeste du parti communiste, 1848)

4. Qu’est-ce que le prolétariat ?

« Le prolétariat est la classe de la société qui tire sa subsistance exclusivement de la vente de son travail, et non de l’intérêt d’un capital quelconque, dont les conditions d’existence et l’existence même dépendent de la demande de travail, par conséquent de la succession des périodes de crise et de prospérité industrielle, des oscillations d’une concurrence sans frein. Le prolétariat, ou la classe des ouvriers, est, en un mot, la classe laborieuse de l’époque actuelle. » (F. Engels, Principes du communisme, 1847).

Un an avant la rédaction du Manifeste du parti communiste, le signe égal est mis entre prolétariat et classe ouvrière. Comment avons-nous fait pour l’ignorer si longtemps ?

5. A qui Marx et Engels donnent-ils un rôle historique ?

« Cette organisation du prolétariat en classe, et donc en parti politique, est sans cesse détruite de nouveau par la concurrence que se font les ouvriers entre eux. Mais elle renaît toujours, et toujours plus forte, plus ferme, plus puissante. Elle profite des dissensions intestines de la bourgeoisie pour l’obliger à reconnaître, sous forme de loi, certains intérêts de la classe ouvrière : par exemple le bill de dix heures en Angleterre. » (Manifeste du parti communiste) Dans ce paragraphe, l’utilisation du mot prolétariat et de la locution classe ouvrière confirme bien le point précédent.

6. Quel est ce rôle historique ?

« … la classe exploitée et opprimée (le prolétariat) ne peut plus se libérer de la classe qui l’exploite et l’opprime (la bourgeoisie), sans libérer en même temps et à tout jamais la société entière de l’exploitation, de l’oppression et des luttes de classes ; cette idée maîtresse appartient uniquement et exclusivement à Marx. » (F. Engels, Manifeste du parti communiste, Préface à l’édition allemande de 1883.)

7. Dans la France d’aujourd’hui, 92 % de la population active est salariée.

Certes, tous les salariés ne sont pas des prolétaires puisqu’il en est qui ont aussi des revenus boursiers, que tous ne sont pas obligés de travailler, et qu’ils peuvent même posséder tout ou partie de leurs moyens de production. Mais chacun conviendra que l’immense majorité de ces salariés sont de vrais prolétaires.

Alors que dans notre pays, les prolétaires n’ont jamais été aussi nombreux en tant que classe en soi et les bourgeois capitalistes aussi peu nombreux, que numériquement la situation objective n’a jamais été aussi favorable au prolétariat - classe ouvrière, c’est le moment que choisit l’Huma pour utiliser la diminution du nombre d’ouvriers afin d’écrire que « la classe ouvrière a épuisé son rôle historique »…

8. Ce qui est épuisé, c’est une conception de la classe ouvrière qui ne doit rien au marxisme, mais à§a l’Huma ne l’écrit pas.

Ce qui est épuisé, c’est la stratégie d’union de la gauche qui a fait la preuve de sa capacité à gérer loyalement les intérêts du capital et à imposer des sacrifices au prolétariat, que ce soit en réhabilitant le profit, en coulant le Rainbow Warrior, en inventant le forfait hospitalier et la CSG, en cassant les solidarités au nom d’un pseudo développement individuel qui trouve sa pleine expression dans les banlieues d’aujourd’hui, en envoyant l’armée franà§aise en Afghanistan, ou en privatisant plus que la droite, pour ne prendre que quelques exemples.

Ce qui est épuisé, c’est une conception communiste de la prise du pouvoir et de son exercice à la place du prolétariat.

Aujourd’hui que le prolétariat est soumis à une pression accrue des capitalistes et de leur représentants politiques, qu’ils soient de droite ou de gauche, ce qu’écrit l’Huma et qui désarme immédiatement une partie des militants de classe les plus actifs, est l’expression de ces épuisements.

9. Sérieusement et pour sourire un peu, après la tristesse provoquée par l’Huma.

Aux « puristes » qui exigent la production d’une valeur d’usage palpable pour entrer dans la catégorie de « classe ouvrière » selon eux, je laisse le soin d’expliquer le processus d’exploitation des cochers de fiacre qui créèrent leur syndicat dès 1898. Comment leur production, immatérielle, pouvait-elle être exploitée ? Faudrait-il chercher dans le crottin ?

10. Au moment où la participation de dirigeants de gauche au gouvernement Sarkozy prouve qu’il n’y a pas d’avenir dans « l’opposition » gauche-droite, ces « épuisements » invitent à revenir au fondamental : la contradiction capital-travail, le rôle historique du prolétariat, le communisme comme « mouvement réel qui abolit l’état actuel ».

Ce n’est pas le prolétariat qui est à refonder, c’est un parti communiste qui soit digne du 21e siècle. Et cette refondation ne pourra pas résulter d’un rassemblement de tendances trouvant des arrangements de sommets, et qui a conduit le PCF a devenir ce qu’il est aujourd’hui. Cette refondation ne pourra se faire que dans une démarche ouverte, associant à égalité de droit et de devoir chaque communiste, sans aucune exclusive, qu’il soit organisé ou non, chacun comptant pour un, sans demander de ralliement ; une démarche permettant à chaque communiste de devenir maître de son parti.

On donnera à cette démarche le nom que l’on voudra, mais parce qu’il faut bien commencer par quelque chose ne serait-ce que pour servir d’anti-modèle, avec d’autres communistes je soutiens l’idée de la tenue d’Assises du communisme en 2008.

11. Contrairement à ce que peuvent laisser penser deux des réactions qui me sont parvenues, je ne porte aucune appréciation sur le travail des deux économistes interviewés par l’Huma, pour la bonne et simple raison que je n’ai pas encore lu leur ouvrage. Ma critique porte exclusivement sur ce qu’a écrit l’Huma et ses conséquences politiques.

12. En conclusion de cette contribution à la réflexion, il me semble que celles et ceux qui sont en recherche pour en finir avec le capitalisme ont tout intérêt à lire ou relire le « Manifeste du parti communiste » de Karl Marx et Friedrich Engels (moins de 30 pages) d’une part, et d’autre part, une contribution contemporaine d’Alain Birh à peine plus longue (une cinquantaine de pages) intitulée « Actualiser le communisme ».

Manifeste du parti communiste : http://www.marxists.org/francais/marx/works/1847/00/kmfe18470000.htm

Actualiser le communisme : http://www.plusloin.org/textes/bihr1.htm

En espérant avoir été plus clair et en souhaitant que le débat se développe entre communistes sans passer par un « centre », j’adresse à toutes et à tous mes fraternelles salutations.

Jean-Franà§ois Autier, ajusteur mécanicien retraité, adhérent du PCF depuis le 3-1-1963 jean-francois.autier chez wanadoo.fr

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