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“20 ans après”, la censure de l’Huma

Article de Claude Marchand partiellement censuré par l’Huma
Friday 13 November 2009

Claude Marchand, ancien correspondant permanent de l’Humanité en RDA, de janvier 1987 à juillet 1990, a été sollicité par l’Humanité pour donner son point de vue sur le 20e anniversaire de la chute du mur. Or son article a été censuré de plusieurs passages. Apparemment, réaffirmer son engagement communiste, contre le matraquage idéologique de la bourgeoisie, dérange désormais la rédaction de l’Humanité. Le texte non censuré a été envoyé à nos camarades parisiens animateurs du blog “Réveil communiste”. Et nous nous faisons un devoir de publier aussi l’intégralité de son point de vue, les passages censurés étant indiqués en gras.

20 ans après

20 ans après, ce sont d’abord des lieux, des visages qui refont surface, comme autant de fragiles repères dans le cours de l’Histoire qui s’emballe cette année-là , 1989. Des tranches de vies bouleversées, bouleversantes, semblables à nombre de celles charriées par le déluge médiatique actuel, mais moins univoques ; à l’évidence, la guerre idéologique n’a pas rendu les armes avec la fin de la guerre froide…

Des histoires jamais simples. Celle de Jürgen, jeune ouvrier ayant fui comme des milliers d’autres la RDA et ses désillusions - démocratie aux abonnés absents, anémie de l’offre de biens de consommation… Rencontré un lundi soir de manif’ monstre sur le Ring de Leipzig, cet élu communiste n’ayant pas, lui, abdiqué tout espoir dans un socialisme à visage humain. Heike et Jürgen, un couple d’amis, témoins horrifiés de la violence de la répression policière le 7 octobre au soir, et leur interrogation impuissante : “Est-ce cela le socialisme ?”.

Des histoires de rires et de larmes. Au soir du 4 novembre, l’optimisme de mon ami Thomas Neumann, graphiste et photographe d’art, l’un des organisateurs de l’immense manifestation berlinoise contre la violence et pour la démocratie. Heike, une autre Heike, une voisine, et son bonheur ivre de la liberté d’avoir pu danser toute la nuit du 9 au 10 novembre dans une discothèque “drüben”, de l’autre côté.. Les sanglots de la romancière Helga Königsdorf, entrée un temps en désespérance quand le slogan “Nous sommes un peuple” chassait définitivement “Nous sommes le peuple” dans une Allemagne déjà en marche vers sa réunification…

Désillusion, espoirs, doutes, tensions, euphorie, bonheur, tristesse, inquiétudes, chaos… Je ne sais si ces événements m’ont laissé indemne. Journaliste communiste français, à l’Humanité qui plus est, j’étais en tout cas armé pour les affronter. Ce fut même ma chance, aussi anachronique que puisse aujourd’hui paraître cet attelage de mots – journaliste communiste - devenu politiquement incorrect au temps de “la mutation”. Alors j’ai choisi de quitter ce journal – professionnellement s’entend, car il reste profondément ancré dans mon quotidien –, notamment pour ne pas avoir à “jeter le bébé avec l’eau sale du bain”, comme certains nous y invitaient.

Le journaliste ? Il a eu totalement carte blanche de sa direction pour “tout raconter”, comme disait José Fort. J’en suis toujours fier, même s’il n’y avait pas à s’en étonner plus que cela, sauf peut-être du côté de ceux qui ne voyaient en l’Humanité qu’une vulgaire feuille de propagande.

Le communiste français que j’étais (et que je suis encore), biberonné avec le Manifeste de Champigny “Pour une démocratie avancée…”, nourri aux idées du “Défi démocratique” de Georges Marchais, conforté par les ruptures du 22e Congrès du PCF, il avait des boussoles pour garder le cap dans ces rudes bourrasques de l’Histoire.

Ce qui s’écroulait, ce n’était pas son modèle, ce n’était pas son monde, même si, dans bien des domaines –santé, éducation, droit des femmes, logement, plein emploi…–, il donnait à voir en partie l’esquisse d’un autre monde possible, plus juste. Pour moi, le communisme, le communisme véritable synonyme de liberté, de démocratie, de justice, de paix, reste plus que jamais à l’ordre du jour de l’avenir de l’humanité. J’en suis persuadé, à plus forte raison 20 ans après.

Claude Marchand

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