Après avoir battu Le Pen, adhérez au parti communiste pour vous donner de la force face à Macron !

« La catastrophe imminente »

Y a-t-il des moyens de la conjurer ?
Dimanche 10 septembre 2006 — Dernier ajout dimanche 24 septembre 2006

L’analyse de la situation actuelle apparemment est assez désastreuse, en d’autres temps Lénine écrivait un texte intitulé : « la catastrophe imminente et les moyens de la conjurer », on rêverait d’une telle intervention. En fait aujourd’hui on a plutôt l’impression que nous sommes du moins en France et en Europe devant la catastrophe imminente sans moyens de la conjurer.

En toile de fond il y a une planète que l’on détruit et dont les ressources s’épuisent, un système impérialiste mondialisé qui accélère cette destruction, nie aux nations le droit à disposer de leurs ressources, le droit à l’autodétermination et le fait en portant partout la guerre, la violence, la torture, le tout sous couvert de valeurs universelles occidentales, une nouvelle croisade qui confond liberté et liberté du marché, pillage sans frein des multinationales financiarisées.

La guerre est hors limite, elle vise moins les soldats (zéro morts) que les populations civiles qui sont les principales victimes. Au droit international, à la possibilité pour une nation de maîtriser son propre développement, partout des traités de libre échange tentent de substituer le seul respect des investisseurs et de « la libre concurrence », empêchant tout développement endogène, tout service public répondant aux besoins des populations. L’Union européenne n’est qu’une des formes de cette mise à mal des nations, une manière de nous priver de notre citoyenneté. A cela il faut ajouter que nous sommes aujourd’hui dans une situation qui n’a rien à voir avec le pillage colonial, il était immoral, mais les puissances colonisatrices instauraient un compromis avec leur propre population, les ouvriers, les couches populaires en bénéficiaient et leur niveau de vie s’élevait. Aujourd’hui la mondialisation impérialiste néo-libérale produit à l’intérieur de l’Occident chômage, dégradation du pouvoir d’achat et entretient dans sa population la haine des autres, sous couvert de « choc des civilisations ». La jeunesse fait particulièrement les frais de cette situation puisqu’elle est désormais assurée de vivre moins bien que ses aînés, et c’est la première fois que s’opère un tel renversement de tendance dans un processus séculaire de progrès.

Une élection présidentielle qui vire au cauchemar :

C’est sur cette toile de fond qu’intervient l’élection présidentielle de 2007. Bayrou a eu une excellente formule : « aujourd’hui pour beaucoup de Français avoir à choisir entre Ségolène Royal et Sarkozy est un cauchemar ». Mais François Bayrou ne rompt pas avec le dit cauchemar, ne serait-ce que parce qu’il se prononce pour l’Union Européenne.

Le cauchemar est qu’aucun candidat ne porte une alternative à ce système. On nous incite à nous battre sur « l’âge du capitaine », sur le look, sur tout sauf sur les enjeux réels. Ne pas faire le diagnostic que je viens d’esquisser fait partie de la disparition des enjeux, il s’agit de substituer à cela la nécessité des « réformes », de « la rupture », pour aller de fait toujours plus avant dans la logique, ne serait-ce qu’à travers l’acceptation premièrement de l’intégration européenne, deuxièmement d’une vision du monde où l’occident est censé porter les valeurs de laïcité, de démocratie face à un monde barbare, troisièmement une pseudo-logique économique qui veut qu’emploi et pouvoir d’achat soit subordonné à la victoire dans la guerre concurrentielle planétaire . Tous les partis politiques en France pour accéder à la représentation nationale doivent se plier à ce consensus. Le système politico médiatique aux mains des trusts et des grands annonceurs crée un champ politique qui définit les limites du « politiquement correct » comme celui des individus et des partis susceptibles d’accéder à cette représentation nationale. Par exemple en violation des faits, il faut inventer un peuple français attaché à l’Europe, nulle intervention n’est crédible si elle ne part pas plus ou moins de cette affirmation, quitte à aboutir à l’invraisemblable slogan du PCF : dire NON à la Constitution européenne pour dire OUI à l’Europe. Le système électoral qui oblige à des alliances fait le reste, surtout quand le financement des partis n’est plus militant mais liés à cette représentativité.

Le peuple français est un des plus rebelle qui soit. En 1995, alors que le monde entier semblait écrasé, il s’est rebellé contre l’ordre néo-libéral, il ne cesse de renouveler ce refus, il a en particulier refusé la Constitution européenne. De cette rébellion a paru un temps se dégager l’idée d’un rassemblement anti-libéral. Mais dès le départ celui-ci a souffert de plusieurs maux :

  • Une absence de liens avec les couches populaires.
  • Un défaut de contenu lié aussi à une absence d’analyse de la situation et donc un déficit de propositions et de perspectives autour desquelles opérer le rassemblement.
  • Avec le primat de la représentativité nationale, ce qui a développé l’exaspération les logiques concurrentielles d’appareil et des questions de personne.

Nous en sommes-là , et pour être tout à fait concret, il va y avoir le plus grand rassemblement de France, la fête de l’humanité. Préparée dans d’autres conditions elle aurait pu être l’occasion du début d’une grande bataille, une mobilisation sans précédent, mais dans la situation actuelle, elle risque au meilleur des cas de n’être qu’une manière de limiter les querelles internes, celles-ci restant sous-jacentes parce que l’Union anti-libérale telle qu’elle a été bâtie n’est que le produit d’un cartel de sommet de groupuscules, sans liens réels avec les quartiers populaires, les entreprises. Au pire des cas elle n’est que le moyen d’éviter l’émiettement de 2002, d’assurer donc la présence au second tour du PS, l’existence d’un groupe à l’Assemblée Nationale, puis d’élus locaux étant subordonnée à ce service rendu. La question de la participation ou non participation à un gouvernement de gauche étant beaucoup moins importante pour la survie des appareils politiques que celle des différents élus qui assurent le financement des partis, le paiement des permanents et des sièges. Il y a d’autres enjeux, en particulier celui pour la LCR de reprendre l’héritage communiste. Il y a des personnalités qui sont prises dans le tropisme médiatique, tout cela ne fait pas une alternative.

Il n’y aura pas de stratégie anti-libérale sans assise populaire

Il faut juger des stratégies à l’aune d’un principe : tout ce qui divise est mauvais et il ne suffit de promouvoir un conglomérat si son principe, les bases sur lesquelles il est établi, entretient la division. Il y aurait pu avoir un rassemblement autour d’un parti mais dans lequel chacun et chacune aurait trouvé sa place parce les objectifs, les perspectives, correspondraient à des attentes réelles. Quand il y a urgence la force politique qui offre perspective, organisation, acquiert ses lettres de noblesse, mais justement il n’y a aucune conscience de l’urgence, de la nature réelle des périls, seulement logique d’appareils cherchant à élargir leur audience, ce qui produit la fausse question : est-ce qu’un parti politique est qualifié pour un rassemblement, ne vaut-il pas mieux une personnalité indépendante médiatiquement reconnue ? Certes il vaut mieux un bon candidat(e) mais est-ce seulement la présence sur un plateau de télévision qui définit le bon candidat ? Etre convaincu d’autre chose que de l’intérêt de sa personne ou de son organisation est peut-être tout aussi essentiel, manifester une volonté politique aussi. Et surtout défendre des contenus dont on est persuadé qu’ils changeront la vie des gens, entamer de ce fait un dialogue réel à partir des expériences de chacun… Est-ce que la référence à la médiatisation ne risque pas d’aboutir à la fois au consensus ou a contrario à de pures candidatures de provocation, dont la « popularisation » médiatique est inversement proportionnelle à la confiance que lui accordent les Français ?

Nous en sommes loin et cette situation n’est pas née aujourd’hui, elle est le produit d’une évolution, en particulier celle du PCF depuis les années 1990, la coupure organisée de ce parti de sa base militante et des organisations syndicales. Toute la gauche y compris le PS a plus ou moins connu cette aspiration vers le haut, vers le politico médiatique, mais dans le cas du PCF, elle était mortifère, surtout intervenant après l’effondrement de l’ex-URSS et des pays satellites européens dont il n’a jamais été fait une analyse révolutionnaire. Seule l’analyse des vainqueurs a eu droit de cité alors qu’il fallait se poser une question essentielle : pourquoi un peuple ne combat plus pour un système qui devrait correspondre à ses intérêts objectifs ? Il y a eu alors confusion, débâcle idéologique renforcée par le démantèlement organisationnel. Cela dit le modèle social-démocrate n’a pas été mieux défendu que le communisme, et l’absence d’alternative a surgi de là , la gauche tout entière a perdu sa raison d’être, s’est coupée des couches populaires. Des analyses dites « sociologiques » sur l’évolution de la population sont venues conforter cette démission, il n’y aurait plus d’ouvriers, à peine des employés, simplement du tertiaire et des couches moyennes. Comme l’économie néo-libérale a prétendu s’imposer comme une « technique » incontournable, rejetant à la marge la politique, le débat autour des choix, la démission a été justifiée par une technicisation sociologique de la population française. Quitte à chaque élection à découvrir que les couches populaires majoritaires ne ressemblent pas à Paris intra-muros et à l’oublier sitôt l’élection terminée.

S’agit-il d’une situation irréversible ? Tout le laisse à penser et le choix récent opéré par le PCF de s’engouffrer dans les comités du Non, de privilégier les forums, au lieu de recréer une organisation, le laisse penser. L’absence totale d’analyse sur la mondialisation impérialiste, sur les grandes tendances de l’heure, sur la montée des résistances, le laisse également penser. Alors qu’il s’agit justement de l’ordre international, sans la compréhension duquel, l’action sur des questions aussi essentielles que les délocalisations, ou l’immigration est difficile, voire impossible. Plus généralement la recherche effective de solutions a été abandonnée avec le renoncement aux luttes à contre courant. Il ne s’agit pas seulement de l’expérience soviétique, mais bien de celle de la gauche qui a mené l’intégration européenne, les politiques néo-libérales. Si aujourd’hui l’Union anti-libérale n’ose pas parler réellement de nationalisations sauf d’une manière ponctuelle, c’est parce que les nationalisations menées dans les années 1980 se sont traduites par des restructurations massives, le licenciement de centaine de milliers de travailleurs, des investissements publics massifs et après ce « travail » elles ont été rendues au privé….Pourtant est-il possible de lutter contre ce que porte le tout marché concurrentiel, le renforcement des inégalités sociales, la destruction des services publics, la mise à mal de l’équilibre environnemental, la guerre généralisée, la fin du droit des nations à l’autodétermination, sans tenir les leviers économiques, sans une planification ? La nécessaire participation des citoyens sans ce minimum a-t-il encore un sens ? Si on évacue ces questions de quoi parle-t-on ?

Si pendant des décennies le PCF a pu constituer un point de référence tel, et à travers lui une perspective socialiste, que même ceux qui ne votaient pas pour lui étaient alertés par ses analyses, ses mise en garde, aujourd’hui électeurs et militants n’ont pour la plupart aucune vision claire du but poursuivi. Sans parler du PS et d’autres comme les Verts…

En revanche, aujourd’hui sur toute la planète, des expériences sont tentées, nous devons les connaître, pour un autre ordre international multipolaire, respectueux du droit des nations, et de la possibilité de répondre aux besoins de la majorité ; mieux, des relations de coopération mutuellement avantageuses, des relations de solidarité, s’esquissent. On ne peut pas construire une alternative anti-libérale si on ignore ce contexte qui est au contraire celui de luttes, de volontés politiques.

Bref nous sommes bien devant la catastrophe imminente, existe-t-il des moyens de la conjurer ? Pour les élections présidentielles de 2007, c’est mal parti. Sauf changement important, ces élections et celles qui suivront ne seront pas le point d’appui de la naissance d’un rassemblement anti-libéral, simplement au meilleur des cas une union de circonstance. Mais peut-être faut-il aller jusqu’au bout de la débâcle pour que ce rassemblement surgisse effectivement. Les attentes sont fortes, la situation ne cesse de se dégrader et le peuple français ne se résigne pas. Il n’attend pas grand-chose de cette élection et il risque d’y avoir un maximum d’abstentions. Ce qui correspond là encore à la tendance continue y compris des élections présidentielles où l’abstention ne cesse de croître. Les candidatures « officielles » du politico médiatique, en l’occurrence le tandem Sarkozy-Ségolène iront-elles jusqu’au bout ? Seront-elles torpillées par leur propre camp ? On mesure le caractère dérisoire des enjeux par rapport à la situation vécue… Face à une peapolisation de la vie politique qui à la fois crée une fascination et un vide abyssal, un champ est ouvert. Mais il passe par un objectif essentiel, s’interroger en priorité sur les conditions dans lesquelles les jeunes, les couches populaires trouveront les moyens réels d’une politisation, d’une intervention effective sur leur situation. Il ne s’agit pas de se réunir pour inventer un programme, mais le rôle des forces politiques est de faire des propositions, de les discuter partout et pour cela retrouver un militantisme de terrain. Si l’on veut une politique anti-néo-libérale il faut que les peuples aient la possibilité de parler et d’agir. Tout ce qui éloigne de cet objectif, quelles que soient les intentions affirmées, ne peut que nous prendre dans le champ politique que je viens de décrire, celui du consensus impérialiste néo-libéral. Il faut donc penser analyses, perspectives, et organisation en fonction de cet objectif. En évitant l’erreur de croire qu’un cartel de sommet, où des « spécialistes » alternent dossier technocratiques et querelles de chef autour des « candidatures », même reproduit au niveau local, est la solution.

Aucun peuple ne juge les organisations, les dirigeants sur des étiquettes idéologiques désormais, il le fait sur l’utilité que ceux-ci présentent effectivement par rapport à leurs problèmes. En quoi l’union anti-libérale présente-t-elle aujourd’hui une utilité quelconque pour notre peuple ?

Tout ceci n’est pas dit pour désespérer ceux qui tentent d’agir mais au contraire pour que nous agissions tous avec un maximum d’efficacité quant à ce qui nous anime, en finir avec ce système meurtrier pour les êtres humains autant que la planète.

De : Danielle Bleitrach lundi 4 septembre 2006

« Nos raisons d’exister valent mieux que notre existence » - Robespierre.

Revenir en haut