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Contribution au 33ème congres (site PCF)

Pour une véritable politique des services publics. Pour une alternative.

Serge Portejoie
Lunes 2 de enero de 2006 — Última actualización Viernes 21 de agosto de 2020

«Sens dessus, dessous, l’école du monde à l’envers», dans ce livre merveilleux et plein d’humour, de poésie, l’écrivain uruguayen, Eduardo Galéano, fait voler en éclats tous les lieux communs et passe en revue les tares d’un «monde à l’envers» ou l’injustice, le racisme, l’obsession sécuritaire, le commerce des armes, le chômage, le saccage de la planète, l’impunité des grandes multinationales, la crétinisation d’une société de la consommation, des médias toujours plus puissants et répugnants, font les lois. Eduardo Galéano n’est pourtant pas un pessimiste, il termine son livre en disant «un autre monde est possible».

Moi aussi, je crois qu’un autre monde est possible et en logique avec Galéano, je pense qu’il suffit de remettre le monde à l’endroit.

D’abord, pour ce qui nous concerne, c’est chez nous, en France, qu’il faut commencer à remettre le monde à l’endroit. En France, nous ne partons pas de rien : le modèle français.

Le modèle français n’est pas à la mode, il est décrié par le politiquement correct, il serait ringard. Le modèle français d’où vient-il ? Pour aller rapidement, on peut lui reconnaître quatre grandes étapes : la Révolution française, la Commune de Paris, le front populaire et la libération. Quatre étapes qui à chaque fois ont marqué des avancées sociales significatives, notamment pour les plus défavorisés ;

Ce n’est pas la place ici pour écrire l’histoire, c’est pourquoi je m’en tiendrai brièvement à donner le contexte et les avancées sociales de la 4 ème étape : la libération. A la libération le rapport de force international issu de la lutte contre les nazis donnait une force considérable au camp socialiste avec l’union soviétique en tête de pont. En France même, le rôle joué par les femmes et les hommes de progrès dans la résistance, notamment communistes, faisait que les leaders politiques de tous bords ne pouvaient ignorer les revendications du peuple. Ainsi des avancées significatives comme la sécurité sociale, le droit de vote pour les femmes puis une certaine émancipation, de nouveaux droits pour les travailleurs furent obtenus. Enfin, avec les nationalisations l’intérêt général l’emportait parfois sur les intérêts privés. La conception républicaine de l’intérêt général a conféré aux services publics un rôle déterminant pour l’organisation du territoire et l’égalité des citoyens devant les services (péréquation tarifaire).

Cependant le capitalisme ne reste pas les bras croisés. Dès les années 50 se mettent en place des laboratoires de réflexion sous l’impulsion d’économistes comme l’autrichien Friedrich Hayek ou l’Etat-Unien Milton Friedman (prix Nobel 1976), des politiques parmi les plus réactionnaires (Harry Truman, Richard Nixon, Ronald Reegan et Margareth Thatcher, de grands patrons dont les Rothschilds), tous des gens s’identifiant aux intérêts de la finance et qui disent que le temps de l’Etat providence est dépassé. Ils encouragent les politiques et les capitalistes de tous les pays à diriger la marche de la civilisation vers le culte du profit. En France et en Europe, des patrons mais aussi des politiques de droite et de gauche siègent ensemble dans de nouveaux clubs de réflexion. Par exemple, en 1973, sous l’impulsion de Zeigniew Brzezinski, la création de la trilatérale a consolidé des «connivences transversales entre des grands patrons venus des Etats-Unis et du Japon avec des socialistes, français notamment, comme Lionel Jospin, Dominique Strauss-Kahn, Laurent Fabius et Pascal Lamy. Pour le théâtre et les petites provocations les mêmes disposent des forums économique de Davos et de Hong-Kong. Dans ces conditions, avec la chute du mur de Berlin et avec l’influence nouvelle des couches moyennes, en particuliers des leaders de celles-ci issus de mai 68 comme Daniel Cohn-Bendit ou Serge July, les socialistes adoptent la stratégie dite du»juste milieu". Ils se proposent de gouverner sans toucher aux privilèges des plus riches, sauf quelquefois à la marge sous la pression populaire. Alors se constituent le fondement idéologique et économique des grands prédateurs de l’industrie, des médias et de la finance, avec la complicité de leurs institutions internationales (banques mondiales, FMI, OCDE, G7 puis OMC, etc…) et celles plus ou moins enthousiaste de toutes les classes politiques occidentales, dont la direction du PCF n’est pas complètement exclue. Ainsi le chômage prend des proportions énormes et les gens ne savent plus à quel saint (politique) se vouer. Les instances de l’union Européenne deviennent le laboratoire de la démolition sociale. Certains commissaires européens dans leur mission de promoteur de la libre concurrence semblent même s’être fixés comme objectif l’élimination des monopoles publics jugés incompatibles avec l’idée de marché unique. Chez ces gens là (comme aurait dit le regretté Jacques Brel), le marché est assimilé à une divinité. Alors, pour paraphraser Lénine : Que Faire ?

Pour se poser la question de l’alternative, il me semble que nous devons partir de deux idées fortes :

  • La première c’est quels sont les véritables besoins des françaises et des français.
  • La seconde c’est quelles sont les solutions qui permettent l’indépendance de la France ?

Les besoins ce sont des services publics rénovés et modernes qui doivent incarner les valeurs d’égalité et de solidarité, capables de répondre aux urgences sociales. Il doit y avoir de grands services publics avec des agents sous statut leur donnant des droits et des devoirs :

  • Education : une éducation dont le déclin est imposée par la classe dominante pour satisfaire les besoins du capitalisme triomphant (création des IUFM par Lionel Jospin, dégraissage du mammouth par Claude Allègre, arrêt de l’école à 14 ans par la droite). Il nous faut une éducation de préférence suivant le principe de laïcité (éducation aujourd’hui en partie privée) ou les apprentissages fondamentaux soient remis au goût du jour : lecture, écriture, calcul, histoire (que des jeunes de quinze ans n’ignorent plus qu’il s’est passé quelque chose avant leur naissance) et esprit critique (au lieu et place du technicisme et du minimalisme). Enfin, faudrait-il sans doute remettre à plat la formation des enseignants ainsi que d’en former assez pour satisfaire les besoins.
  • Logement : le logement (avec application stricte des 20 % de logements sociaux pour les villes de plus de 20 000 habitants et amendes dissuasives pour celles ne les ayant pas encore atteint) et réquisitionner les logements libres qui servent à la spéculation.
  • Eau : la distribution doit être confiée à un service public de l’eau et non à la CGE devenu Vivendi en 1998, la Lyonnaise des eaux ou la SAUR (Société d’Aménagement Urbain et Rural). L’eau est un élément essentiel à la vie. L’eau n’est pas inépuisable et ne doit pas être gaspillée ni polluée. La gestion de l’eau devient une grande question d’aujourd’hui.
  • Transports, une nouvelle régulation publique est indispensable pour les transports aériens et de chemins de fer (Air France et l’ensemble des services de la SNCF doivent être renationalisés, notamment le trafic fret).
  • Energie, les services concernant l’énergie doivent se trouver sous le contrôle du peuple et nationalisés, pareil pour la recherche. Peut-on confier l’entretien d’une centrale nucléaire à des actionnaires ?
  • Communication, les outils de communications (télécoms) doivent aussi être nationalisé (renationalisé). Emploi : enfin un grand service public de l’emploi doit être créé (d’abord en renforçant les ANPE) ’
  • Santé : un grand service public de la santé (par exemple on peut très bien imaginer un laboratoire d’Etat qui serait chargé de produire les médicaments les plus couramment consommés et ayant prouvé leur efficacité pouvant ainsi diminuer les prix des médicaments ainsi que les charges de la sécurité sociale). Le modèle néo-zélandais est à étudier.
  • Audiovisuel : un vrai service public de la télévision reste à créer.
  • Poste : la Poste doit rester une poste de proximité, elle doit récupérer à 100 % ses filiales, tous ses agents doivent être couverts par les titres 1 et 2 du statut de la fonction public.

Certains services publics peuvent avoir des activités parfaitement rentables mais la gestion ne doit en aucun cas être guidée par le souci exclusif de profits.

Des services publics régaliens comme l’armée, la police, les finances ne sont pas à l’abri d’une privatisation partielle.

Quand j’entends, services publics nationalisés, je n’entends pas une nationalisation avec, en gros, un changement d’un PDG et la poursuite d’une politique déjà engagée. J’entends le «plaisir de travailler» en prenant comme point de départ, le rapport du travailleur au produit de son travail avec la satisfaction d’accomplir un boulot à l’efficacité sociale réelle et pour un salaire correspondant à ses besoins. En fait, un travail reposant sur la pulsation du plaisir. Contrairement au travail actuel où les activités sont imposées par l’économie de marché qui étouffe la joie de travailler ou seuls (es) quelques privilégiés (es) éprouvent de la joie dans le rapport de force et l’accumulation du capital. Cette pulsation du plaisir passe par ce que l’on nomme couramment l’autogestion ce qui suppose pour sa réussite qu’elle ne soit pas contrariée par le fardeau d’une quelconque bureaucratie. Si la nation se détermine en fonction de ses besoins et de ses intérêts, la réalisation de ces besoins et de ces intérêts doivent dépendre de l’autogestion qui, elle, se trouve dans sa pratique au plus près du «terrain».

Les privatisations, on l’a vu, s’accompagnent généralement d’une réduction massive des effectifs et d’une dégradation de la qualité de service. Tous les secteurs susceptibles de générer des profits sont visés. Enfin les privatisations consacrent le renoncement à faire prévaloir l’intérêt général. Ce sont de tout autres services publics dont la France à besoin, ce sont des services publics autogérés dans le respect d’égalité, de continuité et d’adaptabilité.

L’appropriation sociale de toute une partie de l’outil économique est nécessaire pour orienter autrement cet outil. Son champ dépasse d’ailleurs celui des services publics et c’est bien entendu au débat public de trancher ce qui doit ou non relever de la maîtrise publique. Mais pour qu’il y ait débat c’est aux militants convaincus des changements nécessaires de porter ces questions. Avec ces questions justement nous devons nous adresser à des personnes très diverses, la plupart ne se sentant pas étiquetées à gauche ou à droite. Si le 29 mai 2005, seulement les personnes se sentant de gauche avaient dit non au projet de constitution européenne, nul doute que le oui l’aurait emporté. Non, c’est un large rassemblement qu’il s’agit de réaliser sur la base des intérêts individuels et collectifs. Seulement alors nous pourrons imposer une alternative s’opposant à la seule recherche du profit.

Pour réussir cette alternative, de mon point de vue, seule une révision des institutions, avec une nouvelle constitution, doit permettre de donner assez de démocratie pour que, notamment les services publics ne soient pas qu’une bureaucratie étatique au service des notables et des possédants, mais des lieux de démocratie où le personnel comme l’usager décideront ensemble les choix à prendre. Les cadres devant surtout vérifier que les choix soient mis en œuvre. Une nouvelle constitution devrait en finir avec la démocratie représentative pour donner place à la démocratie la plus directe possible. Les élus, comme les cadres pour les services publics, se mettant au service des décisions prises par le peuple (qui pourrait être questionné sur toutes les grandes questions de société).

Concernant l’indépendance de la France, il va de soi qu’une grande banque d’Etat devrait être créée. Que le peuple devrait répondre par référendum si oui ou non, il préfère en rester à l’euro ou s’il souhaite en revenir à une monnaie française, ce qui sous-tend une banque centrale de la nation française. Enfin, les usines d’armement devront être nationalisées.

Encore, de mon point de vue, pour l’indépendance de la France, une condition sine qua non : la rupture avec le traité de Maastricht et les instances de Bruxelles. Cette rupture, au lieu de nous isoler, serait au contraire un formidable appel d’air frais pour les autres peuples d’Europe. On en a fait l’expérience avec la victoire du non au projet de constitution européenne. Le Non français a renforcé le Non hollandais. De plus une politique véritablement indépendante de la France, encouragerait les autres peuples d’Europe et d’au delà à demander des politiques de coopérations plutôt que de concurrences.

Vous me le concéderez, mes propositions s’éloignent de la logique des rencontres au sommet entre les directions de partis se définissant de gauche. Non pas que nous devons méconnaître les réflexions des «appareils» politiques mais, il me semble, que c’est au quotidien, dans la vie de tous les jours que nous devons convaincre les françaises et les français qu’une autre politique est possible. Nous devons remettre la politique au goût du jour comme nous y invite les Thuram, Debbouze et autres après les événements dits de banlieue. Une activité politique quotidienne dans les entreprises (du moins celles qui restent), dans la cité, partout. Partout dire : une autre politique est possible, nous vous proposons des alternatives. Prendre son avenir en mains c’est de cela qu’il s’agit. Les combinaisons politiciennes aussi bien montées soit-elles ne pourront rien changer. D’ailleurs (les femmes et hommes) politiques, même au PCF, sont trop souvent coupés par des années de «permanence» des réalités sociales et forment un monde à part ou les conflits de personnes remplacent le conflit entre le capital et le travail. Dans la défunte Union Soviétique, une bourgeoisie d’Etat s’était créée qui ne fonctionnait plus qu’en circuit fermé et pour ses propres intérêts. Empêchons que chez nous en France, avec les notables économiques et politiques, se reproduisent à notre échelle les mêmes défauts.

Ce que je viens d’exposer est un raccourci d’un positionnement. J’espère néanmoins qu’il pourra servir à la réflexion pour le 33ème congrès.

Fraternellement à vous.

Serge Portejoie ( section Losserand, Paris 14ème)

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