« Israël a torturé sadiquement à mort des otages palestiniens, et ne l’a pas caché parce qu’il sait que les médias occidentaux l’ignoreront presque entièrement. » C’est ainsi, en quelques mots, que le journaliste britannique Owen Jones a écrit sur la plus horrible tragédie du XXIe siècle, décrivant les scènes des corps des otages palestiniens que l’occupation a renvoyés à Gaza. Des scènes dont l’esprit et la langue sont incapables de décrire la sauvagerie, où le meurtre et la torture ne sont plus commis en secret, mais pratiqués au grand jour, et justifiés par les gouvernements et les organisations internationales qui sont censés surveiller la vérité.
En novembre 1945, après la Seconde Guerre mondiale, le monde décida de juger les nazis, et les célèbres procès de Nuremberg commencèrent. Ces procès semblaient marquer un nouvel éveil de la conscience mondiale. Ce jour-là, les dirigeants nazis se tinrent devant la justice, accusés de crimes contre l’humanité, et le monde entier résonna d’une promesse universelle, que cela ne se reproduirait plus jamais. Mais l’histoire, comme le disait Hegel : « nous enseigne une seule chose, c’est que personne n’en tire de leçon. » Pendant deux ans de guerre à Gaza, le monde est resté silencieux, et maintenant, il se tait à nouveau face aux images de torture que l’occupation a exercées sur les prisonniers palestiniens, tués sous la torture et dont les corps ont été livrés d’une manière dénuée d’humanité. Des images qui n’ont pas ému la conscience du monde, nous n’avons même pas entendu de condamnation pour ce qu’Israël leur a fait.
L’objectif des procès de Nuremberg était de créer une nouvelle conscience humaine, soulignant que les crimes ne sont pas prescrits, et que chaque âme humaine mérite justice. Aujourd’hui, cependant, nous sommes confrontés à une réalité qui dit le contraire, il y a des âmes qu’il est permis de tuer, et d’autres que le monde est appelé à protéger. Ainsi, la justice se transforme en un miroir brisé, reflétant l’image de la force et non celle du droit, exactement comme l’a dit Bertrand Russell : « Lorsque le faible est puni et que le fort est récompensé, sachez que la justice a été remplacée par la politique. »
La justice est devenue sélective, comme si elle était un privilège accordé selon la géographie, la politique et la puissance, et non selon les valeurs et l’humanité. Aux procès de Nuremberg, on disait que la justice était née des cendres de la guerre mondiale, mais aujourd’hui, la justice est enterrée sous les décombres de Gaza. L’esprit demeure perplexe devant une telle incohérence historique. Comment le monde qui a jugé les nazis peut garder le silence face à des crimes diffusés en direct sous ses yeux pendant deux ans. Et quel sens reste-t-il à la conscience humaine qui a créé les Nations Unies et la cour internationale de Justice, si ce n’est qu’elles sont devenues un simple décor légal ?
La philosophie de la justice n’est pas un texte de loi, mais une conscience morale. Hannah Arendt avait mis en garde contre la violence dans son livre La Banalité du Mal en disant : « La violence peut devenir une simple routine que les gens pratiquent sans éprouver de culpabilité. » C’est ce qui se passe aujourd’hui, la violence n’est plus une exception, mais une pratique politique légitime justifiée par des déclarations de légitime défense. Le plus dangereux dans le crime, ce n’est pas le sang, mais la justification, car la justification transforme le crime en logique, la logique en politique, et la politique en une répétition constante de la sauvagerie.
Les questions auxquelles le monde est confronté aujourd’hui ne sont pas seulement des questions légales, mais aussi des questions existentielles et humaines. L’être humain moderne est-il encore capable d’être juste ? La justice a-t-elle encore une valeur absolue, ou est-elle devenue un simple outil entre les mains des puissants ? Et pouvons-nous, au milieu de cette destruction, rêver qu’arrive le jour où ceux qui ont commis le génocide à Gaza, tué les enfants et déchiré son humanité, seront tenus responsables ?
Si ce jour n’arrive pas, l’histoire se sera trahie, et la justice qui a donné naissance à Nuremberg sera morte deux fois, une fois lorsqu’elle a soutenu Israël dans sa guerre contre les palestiniens, et une fois lorsqu’elle a gardé le silence sur le génocide. Pourtant l’interrogation essentielle, celle qui hante la conscience vivante, demeure, serons-nous un jour témoins de nouveaux procès de Nuremberg pour les victimes du génocide ? Ou vivrons-nous éternellement dans une époque où le bourreau est récompensé et la victime condamnée ?
Amal Rattrout 18/10/2025