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Que faire face à ce gouvernement ?

Après le 49-3, le conseil constitutionnel, la promulgation de la loi…
Samedi 22 avril 2023 — Dernier ajout jeudi 25 mai 2023

Le refus populaire de la réforme des retraites, largement majoritaire, et les fortes mobilisations sociales, n’ont pas fait reculer le président, ni le gouvernement. Pire, comme l’a dit la nouvelle secrétaire générale de la CGT, « Macron nous tend la main après nous avoir fait un bras d’honneur ». L’intersyndicale appelle à poursuivre les actions locales et à organiser un « raz-de-marée populaire » le 1er mai prochain.

Mais tout le monde comprend bien que ce régime politique ne craint pas l’impopularité, que notre système dit « démocratique » peut fonctionner contre une large majorité populaire. Un « expert » médiatique justifie le refus d’un référendum en expliquant « si vous demandez aux gens s’ils veulent travailler plus ou moins, la réponse est évidente ». Dans notre « modèle » démocratique occidental, la démocratie est pour eux un obstacle. Ils veulent bien organiser de temps en temps une élection présidentielle à coup de milliards de dépenses publicitaires, mais ensuite… c’est eux qui décident contre la majorité.

Mobilisons-nous pour le 1er mai, mais la formule du « raz-de-marée » risque de n’être qu’une incantation médiatique, comme la volonté de « mettre la France à l’arrêt » il y a quelques semaines, sans une analyse concrète de cette situation apparemment bloquée. Quelle que soit la force des manifestations, ce pouvoir n’en tiendra pas compte ? Pourquoi ? Nous avions ouvert le débat début mars. Il est encore plus important aujourd’hui, après la démonstration de force du pouvoir. Que peut-on faire face à ce gouvernement ?

La violence est une impasse qui se retourne contre le mouvement !

Dans les réactions militantes, il y a beaucoup de colère et elle se traduit chez certains par la recherche de l’affrontement avec la police, laissant la place aux « blacks blocs » et à la casse de ce qui semble représenter le pouvoir… des banques le long des manifs, du mobilier urbain, des installations de réseau comme des feux de croisement, des armoires de câblage [1], des permanences de député. Ce 17 avril, pour la deuxième fois à Lyon, c’est une mairie de quartier qui est attaquée, avec des dégradations lourdes, et symboliquement les deux fois, une mairie de gauche. Il y a eu aussi le service public des impôts, le lieu où beaucoup de retraités prennent rendez-vous pour se faire aider dans des démarches aujourd’hui totalement dématérialisées…

Certains croient que les casseurs font peur au pouvoir. Mais on voit à quel point Darmanin s’en sert ! La révolution, ce n’est pas quelques groupes violents, se sont des millions de citoyens mobilisés et unis ! [2]

Il faut le dire clairement, non seulement ces violences ne font peur ni aux patrons ni au pouvoir, non seulement la casse ne gêne que les salariés et les usagers, mais les violences freinent les mobilisations, divisent le mouvement social entre craintes et justifications, elles servent les médias et au final le pouvoir en justifiant la répression de tous, et surtout, elles cachent le fonds du problème, le capitalisme et le lieu où il exerce sa domination, l’entreprise.

D’ailleurs le MEDEF se fait très discret et malheureusement, la colère ne s’exprime que contre Macron, pas du tout contre le patronat, alors que c’est lui qui en coulisse bloque toute augmentation des cotisations, et se prépare à piller la SECU avec ses assurances privées et ses retraites par capitalisation.

Le défaitisme est la conséquence de l’électoralisme

Pour la majorité de ceux qui ont manifesté, la réaction de colère se traduit plutôt par le défaitisme, le sentiment qu’on n’y peut rien, que ce pouvoir, bien qu’illégitime, est intouchable. Mais c’est la trace d’une illusion sur ce que peut être le débouché d’un grand mouvement social, illusion marquée par des décennies d’électoralisme à gauche. Les conflits se vivent d’abord dans l’espace médiatique, avec un rôle central des manifestations qui sont supposées conduire le gouvernement à reculer face à un mouvement d’idée devenant majoritaire, son impopularité fragilisant sa préparation des prochaines élections. L’électoralisme est ainsi le cadre de l’action. Rappelons le puissant mouvement contre la réforme des retraites de Sarkozy en 2010 qui a produit une telle colère contre lui qu’elle a conduit à l’élection… de Hollande.

Certains cherchent aujourd’hui une solution institutionnelle contraignant à des élections pour pouvoir changer de gouvernement. Les députés FI évoquent ainsi une nouvelle motion de censure qui serait votée par la droite et deviendrait majoritaire. Mais pour obtenir quelle majorité politique ? Un miracle qui donnerait une majorité de gauche dans un pays où elle mobilise 30% maximum des votants, autrement dit moins de 15% des citoyens ? Chacun sait que le risque politique serait au contraire de conforter la tendance à droite et que le rejet de Macron conduise à l’union des droites et au succès de Marine Le Pen…

Car en fait, quel est le rapport de forces réel ? Laissons de coté les sondages et regardons les faits. 3,5 Millions de manifestants sur 45 millions d’adultes, à peu près le niveau de 2010… et combien de grévistes ? 1 ou 2 millions sur 32 millions d’actifs ? Avons-nous mis « la France à l’arrêt » ? Il suffisait de regarder la circulation, les centres commerciaux, les zones d’activité pour être sûr que la France était à peine freinée ! Même les services publics, et notamment la plupart des collectivités locales fonctionnaient, et il a fallu parfois des maires décidant de fermeture, parce-que le nombre de grévistes étaient insuffisants pour arrêter l’accueil du public !

Quelles leçons tirer de la contradiction entre la force du refus de la réforme et l’incapacité à faire reculer le pouvoir ?

Dans le manifeste du parti communiste, Marx apporte un éclairage essentiel pour comprendre le lien, entre une lutte, victorieuse ou pas, et ce qu’elle doit construire : Parfois, les ouvriers triomphent ; mais c’est un triomphe éphémère. Le résultat véritable de leurs luttes est moins le succès immédiat que l’union grandissante des travailleurs

C’est une question très actuelle. Le rapport de forces social ne permet pas de faire reculer un gouvernement dans un capitalisme qui n’a plus de « gras » à distribuer, qui a besoin de la guerre, d’une économie de guerre, et donc d’une « démocratie » de guerre. Mais si le mouvement social permet de renforcer « l’unité du peuple », de conforter les organisations syndicales et politiques, de créer des bases militantes partout, alors il est victorieux car il prépare l’avenir, c’est à dire les conditions d’un rapport de forces favorable, un rapport de forces capables de sortir du piège de l’électoralisme, du « tout sauf Macron » qui laisse la place à l’extrême-droite.

Il y a donc deux questions qui devraient être largement débattues dans le mouvement social, autant au niveau syndical que politique

1/ Pourquoi le refus d’une majorité des 45 millions de citoyens ne se traduit pas par des mobilisations de même ampleur ? pourquoi n’avons-nous pas dix millions de grévistes capable d’arrêter toute activité pendant plusieurs jours ?

2/ Pourquoi le refus de la réforme des retraites ne conduit pas à un virage politique à gauche, porteur de réformes contre le capitalisme ?

Sur le premier point, il est utile de reposer la question de l’article Pourquoi et comment mettre « la France à l’arrêt » ? qui interroge « Le but, c’est la France à l’arrêt ou le capital sans profit ? ». Et de prolonger le débat sur les freins à la mobilisation

Mais aujourd’hui, il faut aussi ouvrir le débat sur le deuxième point. Car si le RN peut être le gagnant politique de la période, ce n’est pas seulement par ses propres efforts de « banalisation », ni par la course de la droite aux idées du RN, c’est aussi que de larges part du peuple ne voient pas de contradictions entre leurs intérêts et le discours du RN. Et pourtant ! Pire, de nombreux manifestants contre les retraites pourraient décider d’utiliser le bulletin RN par colère contre Macron ou désespoir que les choses bougent.

Mais si cette éventualité est possible, c’est bien que si le refus de la réforme des retraites est largement majoritaire, le modèle économique que la retraite à 60 ans suppose n’est pas du tout majoritaire ! Si Marine Le Pen peut refuser la retraite à 64 ans, ce n’est évidemment pas pour renforcer la sécurité sociale, le principe du financement de la santé, de la retraite et de la dépendance par des cotisations venant de la seule source de richesse, le travail. L’enjeu derrière la réforme des retraites est bien le financement de la SECU, la part des richesses produites par le travail qui est consacré à la solidarité et donc qui échappe à l’appropriation privée du profit des entreprises.

En fait, un référendum pour la retraite à 60 ans serait évidemment un succès pour la retraite, mais un référendum pour l’augmentation des cotisations sociales, et la nationalisation des grandes assurances serait très probablement un échec ! Voila le problème politique fondamental qui empêche le mouvement social de devenir réellement majoritaire, qui empêche de transformer le refus de la réforme en engagement contre le système économique qui veut l’imposer, donc s’engager dans l’entreprise pour reconquérir la SECU en assurant son financement par les cotisations !

A ceux qui croient que c’est le problème de ceux qui ne manifestent pas, rappelons que ce lundi 17 décembre, les plus engagés des manifestants qui se retrouvaient devant des mairies avaient comme premier slogan « Macron démission », un slogan qui enferme le mouvement dans l’impasse de l’électoralisme, et qui laisse la place aux casseurs.

Alors, que faire contre ce gouvernement ?

Il est urgent de tourner toutes les forces militantes vers l’élargissement du mouvement, la réponse aux questions qui freinent l’engagement, en assumant la vérité du rapport de forces qui n’est pas suffisant aujourd’hui pour gagner, mais qui peut s’élargir en interpellant tous les salariés. « Nous ne sommes pas assez forts pour faire reculer le gouvernement, parce-que si vous êtes très majoritairement mécontent, vous n’êtes pas assez organisé, dans l’entreprise comme dans les quartiers. Vous ne garderez pas votre retraite en étant spectateur, décidons ensemble de formes d’action réalistes, à votre portée, sur le terrain. »

L’enjeu des retraites (comme de l’hôpital ou de la dépendance), c’est le financement par les cotisations, c’est à dire la répartition du profit entre le capital et le travail. C’est le patronat qui doit céder en acceptant de financer plus les retraites. C’est sur le patronat que la pression doit monter pour l’amener à négocier et la pression monte quand on touche au profit, donc quand la grève arrête la production.

Il faut tourner tout le mouvement social vers les entreprises et la mise en mouvement de salariés qui décident d’exiger leur part du profit pour financer les droits sociaux. Cela permet d’ailleurs d’élargir les revendications en faisant le lien entre retraite, chômage, maladie, hôpital, dépendances…

Le bon outil pourrait être un référendum populaire, pas celui qu’autorise ou non le conseil constitutionnel, mais un référendum coorganisé par les forces syndicales et politiques avec des journées nationales d’action d’abord organisées dans les entreprises avec un suivi des signatures de ce référendum. Quand un collectif de travail le décide, cela peut se traduire par une grève, mais on peut commencer sur un site avec un simple point de rencontre, de premières signatures, une rencontre publique à proximité, une assemblée de personnel. Tous les élus de personnels peuvent se mobiliser dans leurs instances pour faire vivre ce référendum populaire.

Et si des millions de salariés commencent à se demander combien de signatures il y a dans leur entreprise, combien dans celle d’a coté, combien dans leur ville, le mouvement aurait trouvé ses racines. Il pourrait alors se dresser face au patronat et au pouvoir en affirmant sa force retrouvée. Des manifestations plus larges pourraient être réussies et surtout, de millions de salariés pourraient vouloir s’organiser pour aller plus loin, interroger le fonctionnement de la SECU, et s’engager sur un contenu qui nécessairement, mets hors jeu toutes les droites et oblige la gauche à dire la vérité sur son projet de société, le capitalisme régulé ou une république sociale ?

[1certains disent que mettre le feu à l’intérieur d’un mat de feux de croisement permet de couper les réseaux qui alimentent les caméras de surveillance

[2Rappel historique, les dix millions de grévistes de mai 68 ont obtenu 30% de hausse des salaires (entre autres), mais les pavés et la barricades ont produit un parlement tout à droite en juin !

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