Après avoir battu Le Pen, adhérez au parti communiste pour vous donner de la force face à Macron !

La direction de la CGT refuse de mener la bataille…

Lundi 2 mai 2005

La direction de la CGT refuse de mener la bataille… et organise volontairement la confusion

Alors que la direction nationale de la CGT tentait de neutraliser la centrale syndicale dans la bataille contre cet incroyable coup de force du capitalisme qu’est le projet de « traité constitutionnel européen », le CCN (Comité Consultatif National = le parlement de la CGT) s’est clairement prononcé, le 3 février dernier, contre ce traité : « la CGT se prononce contre la construction européenne actuelle marquée par un assujettissement des droits sociaux aux logiques de la rentabilité et de la concurrence dont les principales dimensions se retrouvent dans le projet de traité constitutionnel. Le CCN se prononce pour le rejet de ce Traité constitutionnel. Il s’engage à poursuivre et développer les débats initiés ». On aurait pu penser que cette prise de position qui a pu surmonter une âpre résistance de la direction nationale (suite à cela, B. Thibault a même pensé démissionner…) allait permettre à la CGT de s’inviter au débat qui mobilise en ce moment tout ce que la France compte de militants préoccupés de la situation sociale et de son avenir européen.

Or, depuis ce 3 février, la direction orchestre une inquiétante absence dans le débat national. Objectivement, cette absence empêche l’expression pleine et entière du syndicat sur le sujet. A ce jour, dans l’hebdomadaire de la CGT (la NVO, Nouvelle Vie Ouvrière), seuls le texte voté par le CCN ainsi que la mise au point de B. Thibault déclarant que le CCN n’est pas un organe démocratique (!!?) ont été publiés. Et depuis, le silence du journal sur le sujet est absolu.

B. Thibault se découvre… Entre temps, il y a bien eu une étrange interview de B. Thibault au soir des manifestations du 10 mars dernier. Pourquoi étrange ? Tout simplement parce que la 2e chaîne de télévision nationale lui a ouvert une émission spéciale de 10 minutes, à une heure de grande écoute (juste après le journal de 20 heures), ce qui est un accueil inhabituel pour le représentant d’un syndicat de lutte anticapitaliste, mais qui l’est certainement moins pour un syndicaliste de « proposition ». Et au cours de l’échange complaisant que lui a accordé l’eurocrate Alain Duhamel, le secrétaire de la CGT s’est découvert : selon lui, la « Charte des droits fondamentaux » serait une avancée positive du traité soumis au vote des français, ce qui est particulièrement scandaleux dans la bouche d’un secrétaire fédéral de la CGT (nourrit-il désormais son analyse politique « indépendante » auprès de François Hollande ?). De plus, alors qu’Alain Duhamel lui demandait ce qu’il allait voter le 29 mai prochain, il a répondu qu’il tenait à garder son vote secret (secret de Polichinelle, tout le monde ayant compris que cela signifiait voter « oui »).

Comment en est-on arrivé à ce que la direction nationale de la CGT dans sa quasi-totalité, se retrouve en décalage aussi complet avec l’objet même de son existence et avec la majorité de ses adhérents ? Où sont les vrais démocrates, au CCN ou à la direction ? Comment est-il possible que cette direction essaye d’entraîner toute l’organisation sur la voie de la démission face au capitalisme sans organiser un réel débat dans le syndicat ? Car quel syndicaliste sensé peut aujourd’hui croire réellement à ce leurre qu’est la « Charte des droits fondamentaux » qui ne sont que de vagues vœux pieux devant l’arsenal des mesures institutionnelles qui verrouillent toute possibilité de mener une véritable politique sociale ?

Enfin, dans la NVO… Depuis la décision du CCN, je guette dans l’hebdomadaire de la CGT (la NVO), tout article, toute prise de position, toute information qui pourrait éclairer un syndicaliste de base sur le réel contenu du « traité constitutionnel européen ». Et rien, jusqu’à ce numéro 3164 du 15 avril 2005 qui titre : « L’avenir en débat » sur un fond photographique de documents posés sur un drapeau européen. A priori peu offensif, le titre me laisse dubitatif. Vite, je me rue sur cet article d’une page et demi. Il est court, mais annonce qu’il est le premier d’une longue série.

La première moitié de l’article est consacrée aux échanges dans les différents pays d’Europe. Le journaliste semble désolé de constater que les sujets de débat traitent des problèmes nationaux et qu’ils ne « se situent pas d’emblée au niveau européen ». Honte donc à ces femmes et ces hommes qui osent parler des problèmes qu’ils vivent dans leur pays et non de ce noble et formidable Saint Graal européen…

Et puis, le journaliste souligne (toujours avec dépit semble-t-il) qu’en fait, s’il y a un tel remue-ménage en France, c’est à cause de la spécificité française sur l’Europe et surtout à cause de la « réelle exaspération face à la politique sociale menée par le gouvernement », exaspération qui, suggère-t-il détournerait le débat du vrai sujet en « figeant la diversité des positions en deux camps ».

Le débat dans la CGT… La deuxième partie de l’article est consacrée au débat dans la CGT. Où l’on apprend que les avis peuvent être partagés entre les salariés "qui ont gagné de réelles avancées avec la mise en place de comités de groupe européens et ceux qui subissent des délocalisations à répétition ou des politiques sectorielles européennes dévastatrices comme dans le domaine du transport ferroviaire, par exemple". On ne peut qu’être curieux de rencontrer ces salariés qui ont tant gagné… Et histoire de bien nous le faire rentrer dans la tête, le journaliste nous ressert le plat déjà glacé de la "Charte des droits fondamentaux" qui serait une grande victoire "des exigences syndicales et des luttes sociales" !! A ce moment de l’article, le suspense devient total : le journaliste va-t-il nous inviter à voter "oui" ? En fait, bizarrement, il rejette d’un revers de la main les partisans du "oui" et ceux du "non". La CGT reviendrait-elle à l’anarcho-syndicalisme ? Il nous apprend en effet que le "non" ne servira à rien, car le traité constitutionnel ne pourra pas tenir (ndlr : contre les coups de boutoir des luttes de la CES ?), je le cite : "on voit mal en effet comment pourrait être préservé si longtemps un équilibre aussi instable". S’ensuit une longue diatribe compliquée (un peu comme un gamin pris la main dans le sac et qui veut nous faire croire qu’en fait il n’aime pas les bonbons…) pour nous expliquer qu’en fait, le devoir de la CGT est de "poursuivre le débat avec les salariés plutôt qu’à mener campagne".

Le Code du Travail et les conquêtes sociales sont menacées d’être rayées d’un coup de plume et la direction de la CGT (par sa voix) nous explique qu’il faut baisser la garde. Soi-disant "le syndicalisme ne saurait sans risque être partie prenante" (!!!). L’article nous explique qu’en fait, "c’est la dynamique de l’action qui doit d’abord s’imposer" ; les décisions politiques n’auraient donc aucune influence sur les salaires, la sécurité sociale, les retraites, la démocratie dans l’entreprise, les services publics ? L’action et la lutte sont bien sûr fondamentales, mais doivent pouvoir se transformer politiquement ! C’est le B.A.BA du syndicalisme. Pourquoi le nier ? Mais d’ailleurs, selon le journaliste, la directive Bolkestein serait revenue "à la case départ", montrant ainsi que "la fuite en avant libérale peut être aujourd’hui stoppée". Si cela n’était pas aussi important, on pourrait en rire… Quand on sait qu’une nouvelle mouture est déjà en préparation pour l’après référendum, on a presque envie de paniquer devant autant de naïveté… Finalement, dans un emballage à faire pleurer dans les chaumières, son article se termine par "l’essai qu’il faut transformer" (l’essai marqué étant la soi-disant disparition de la directive Bolkestein) : "qu’enfin le Parlement et le Conseil européen mettent à l’ordre du jour et préparent concrètement la définition des « services d’intérêt général » garantissant l’avenir et le développement des services publics de qualité dans toute l’Europe". Propos consternants et dignes de Raffarin…

La majorité de la direction de la CGT vote comme le Medef… C’est avec lucidité qu’il faut désormais se rendre compte que la majorité de la direction de la CGT vote comme le Medef. A cela, il n’y a rien de bien étonnant lorsque l’on sait que la plupart des membres de la direction de la CGT s’est positionnée pour le « oui ». D’ailleurs, certains militent ouvertement comme adhérents de « Confrontations », une association qui rassemble patrons, femmes et hommes politiques et syndicalistes partisans de cette Europe capitaliste supranationale. On y retrouve Jean-Christophe Le Duigou, Joël Decaillon, Francine Blanche, Alain Obadia, tous dirigeants de la CGT et qui côtoient Francis Mer, Franck Riboud, Jean Peyrelevade, Jacques Delors, Elisabeth Guigou, Dominique Strauss-Kahn, Michel Rocard… ainsi que certains anciens élus ou responsables du PCF (la présence de Sylviane Ainardi, ancienne député européenne, explique pourquoi elle s’est abstenue lors du vote sur la directive Bolkestein…).

Décidément, ce référendum est un révélateur qui laissera des traces pour l’avenir. Cela laisse ouvert la possibilité d’une recomposition des forces en présence, clarification que l’on doit appeler de tous nos vœux et qui doit être consciemment organisée.

Pascal Brula, le 19 avril 2005

Revenir en haut