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HENRI ALLEG S’EST ÉTEINT À L’ÂGE DE 92 ANS

Un ardent défenseur de la cause nationale

Dans le quotidien algérien El Watan
Lundi 22 juillet 2013

Vous trouverez en pièce jointe le numéro d’El Watan daté du samedi 20 juillet 2013, avec en page 7 une page complète en hommage à Henri Alleg.

Cet hommage rendu par le plus grand quotidien algérien francophone montre la place qu’a tenu Henri Alleg, et au delà de lui, le Parti Communiste Algérien, dans la lutte de libération nationale et l’histoire de l’Algérie contemporaine.

Celles et ceux qui font l’effort de lire la totalité du numéro du samedi 20 juillet 2013, pourront, comme un clin d’ ?il de l’histoire, prendre connaissance de la fin d’une série d’articles qui pose la question du pouvoir en Algérie… du sens de la révolution, à mettre en regard des « révolutions dans le monde arabe » actuelles, et leur trahison par ceux qui ramassent la mise sans ou contre leur peuple.

A noter que les militants du PCA, dont certains ont été torturés ou éliminés par les « vainqueurs » de la révolution algérienne, après être entrés en clandestinité, ont reconstitué une force communiste qui ne participe pas aux « élections », divisée en plusieurs groupes depuis la mort en 2005 de leur dirigeant charismatique EL HACHEMI Chérif : « Il est, en 1966, membre fondateur du PAGS et président du Mouvement démocratique et social qu’il fonde en 1996. Il a refusé de cautionner tous les processus électoraux initiés en Algérie depuis 1990, estimant ceux-ci biaisés et au bénéfice du pouvoir en place. Il a été l’opposant le plus radical à l’intégrisme et prônait la »double rupture« , avec l’islamisme et le système rentier au pouvoir en Algérie ». cf Wikipédia.

Le premier maire de Tipasa, chère à mon cœur, après l’indépendance était du PAGS : une des premières mesures prises aura été la construction de petites unités HLM pour y loger, de manière décente, les anciens indigènes de la République française, qui affiche si fièrement sa devise « Liberté, Egalité, Fraternité ».

Pour ceux qui voudraient mieux appréhender l’Algérie d’avant l’indépendance, il existe un nombre conséquent d’ouvrages historiques. Mais pour moi le choc aura été la lecture de « Ce que le jour doit à la nuit » de Yasmina KHADRA, édité en livre de poche Editions Pocket.

Je conseille d’ailleurs la lecture de TOUS les ouvrages de Yasmina KHADRA, sans exception, à la fois pour les qualités littéraires et les thèmes abordés (« Les hirondelles de Kaboul » est également un choc, traitant de la place de la femme dans une société islamiste jusqu’auboutiste dans la haine de la femme, mais aussi de la lâcheté dont le commun des mortels peut faire preuve soumis à un système totalitaire). Un film a été réalisé l’année dernière tiré de « Ce que le jour doit à la nuit », dirigé par Alexandre Arcady. Mieux vaut voir le film en premier !!! Le thème traité est la vie d’une bourgade de l’ouest algérien, dans la région de d’Oran, jusqu’au déclenchement de la guerre de libération : un portrait sans complaisance avec l’Amour entre les êtres, aussi.

  • Henri Alleg n’a jamais renié ses idéaux
  • Il a beaucoup fait pour la cause nationale, sans le claironner sur tous les toits et sans revendiquer le moindre mérite.

De Abdelkader Guerroudj, moudjahid ancien dirigeant du PCA, à Annie Steiner, moudjahida, en passant par Abdelmadjid Azzi, syndicaliste, ou encore de simples militants visiblement marqués, il y a de l’émotion et de la reconnaissance après l’annonce de la mauvaise nouvelle de la mort d’Henri Alleg, qui nous a quittés à l’âge de 91 ans, après une vie pleine de luttes. Né à Londres, de parents juifs russo- polonais, Henri Alleg s’installe en Algérie en provenance de Paris, en 1939, et milite au sein du Parti communiste algérien. En 1946, il épouse Gilberte Serfaty, qui deviendra comme lui une ardente militante communiste.

ENGAGEMENT PRÉCOCE

En 1951, il est directeur du quotidien Alger républicain. Il entre dans la clandestinité en 1955, date d’interdiction du journal en Algérie. Il continue cependant à transmettre des articles en France, dont certains sont publiés par l’Humanité. Il est arrêté le 12 juin 1957 par les parachutistes de la 10e DP au domicile de Maurice Audin, son ami, arrêté la veille et qui sera torturé à mort.

Torturé, Alleg sortit vainqueur de ces épreuves qu’il sut transformer en combat. Ce que Alleg voulait nous faire comprendre, la « réponse » qu’il donne à Â« la question », c’est précisément qu’une victoire est possible et que le bourreau peut devenir dès maintenant le vrai vaincu.

Ses tortionnaires n’ont pu le transformer ni en cadavre ni en traître. Ils en ont fait, malgré eux, le témoin de leur ignominie et surtout de leur échec. C’est là où s’est crié le philosophe anticolonialiste Jean- Paul Sartre avec son célèbre : « Nous sommes tous des assassins  » en concluant que « la France n’épouvante personne, elle n’a même plus les moyens d’intimider, elle commence à faire horreur, c’est tout ». La torture, Henri la connaît pour l’avoir subie dans sa chair. C’est pourquoi, dès qu’on évoque le nom d’Alleg, surgit des entrailles La Question témoignage implacable sur la torture pendant la guerre d’Algérie interdit de parution et qui eut un formidable retentissement auprès de l’opinion internationale. Dans son hommage, François Hollande a affirmé qu’« effectivement La Question a éveillé la conscience des Français ».

L’ALGÉRIE AU COEUR

Rien que pour cela, Henri mérite tous les égards, lui qui a côtoyé la lutte, aimé l’Algérie et épousé sa cause. Mais ce n’est là qu’une facette de l’homme engagé et enragé contre toutes les injustices et les inégalités qu’il a combattues de toutes ses forces. Tout jeune débarqué à Alger en 1939, il tombera amoureux de cette ville qui devient sa ville. Très vite, il se révolte contre le régime colonial et s’engage comme journaliste au quotidien Alger républicain et comme militant au Parti communiste algérien.

William Sportisse, son ami des bons et mauvais jours, qui était avec lui au front et face aux rotatives, dresse de lui un portrait plein de tendresse, où les deux hommes liés par une complicité sans faille étaient aussi liés par pratiquement le même destin.

Dans ses mémoires, Henri signale qu’Alger républicain était le seul à  échapper au monopole de la presse quotidienne détenue par la grosse colonisation. Le seul, qui chaque jour pouvait dire l’effroyable réalité qui se cachait sous l’hypocrite appellation des « trois départements », le seul à  dénoncer « la responsabilité de l’administration et du pouvoir colonial dans l’asservissement et l’arriération du pays ».

Après le coup d’Etat de Boumediène en 1965, Henri a été conseillé par ses amis Bachir Hadj Ali et Sadek Hadjeres, secrétaires du PCA, de rejoindre la France pour éviter les ennuis qui se profilaient.

A Paris, il avait pour tâche d’activer au sein de l’ORP et de représenter le PAGS, héritier du PCA. « J’avais accepté la tâche mais à vrai dire, sans grand enthousiasme, car elle signifiait qu’il faudrait quitter le pays sans qu’il soit possible de prévoir une date de retour. Chaque éloignement nous était toujours apparu comme un arrachement douloureux sans que nous ayons pourtant jamais douté un instant que, quels qu’en soient les détours, le chemin nous ramènerait vers cette Algérie enfin libérée où nous voulions vivre. » En France, Henri et ses camarades éditeront une revue Révolution socialiste qui, pour l’essentiel, reprenait des textes diffusés en Algérie par des militants, qui comme Sadek Hadjeres, Boualem Khalfa et Abdelhamid Benzine, avaient pu échapper à l’arrestation. Ceux qui étaient restés avaient été arrêtés, subi des tortures et que Bachir Hadj Ali avait fidèlement décrites, de manière irréfutable, dans L’Arbitraire publié aux éditions de Minuit.

COMMUNISTE CONVAINCU

« Pour moi, rien ne pouvait être plus révoltant, je retrouvais avec une sorte de nausée la caricature d’un passé abject qui semblait ressusciter. » Après une période de doutes, Henri poursuivra son travail de journaliste à l’Humanité en s’engageant dans l’édition d’une Histoire de la Guerre d’Algérie, avec la complicité de son épouse Gilberte et de quelques amis. En février 2002, Henri se retrouve dans le vieil immeuble qui servait de siège à Alger républicain près de la Grande Poste, avec une cinquantaine de vieux camarades pour réaliser « la grande aventure d’Alger Républicain  ». C’était l’un de ses ultimes voyages.

Depuis, il vivait diminué chez lui dans la région parisienne, ayant peu de contacts avec l’extérieur. Un ami commun, Kamel Kidji, nous avait arrangé un rendez-vous au mois de juin dernier, mais fatigué, Henri a fini par le différer. Nous devions nous revoir, mais le destin en a décidé autrement Kamel raconte qu’Henri « était très attentif aux autres. D’ailleurs, j’ai décelé un tic chez lui : quand il parle avec une personne il le prend toujours par la main, il était très tactile, la première fois que j’ai su qu’il était né en Angleterre, à Londres, c’était au milieu des années 1980. J’étais en compagnie d’une amie anglaise, ce qui fut le prétexte de parler de sa naissance anglaise, Henri adorait la vie et les figues ». On ne peut que s’incliner devant cet homme au parcours exceptionnel, miné par l’exil involontaire.

Ami d’Aragon qu’il appréciait beaucoup, Henri de là où il est pourrait se délecter à nouveau de ces vers sublimes du célèbre poète : « Rien n’est jamais acquis à l’homme/Ni sa force ni sa faiblesse/Et quand il croit serrer son bonheur, il le broie/Sa vie est un étrange et douloureux divorce/ Il n’y a pas d’amour « heureux… »

Hamid Tahri

Pour avis

Le 17 juillet 2013, Harry Salem, dit Henri Alleg, nous a quittés à l’âge de 92 ans. Journaliste et militant communiste, il a consacré sa vie aux luttes contre le fascisme, le colonialisme, le racisme et l’exploitation  ; il s’est battu pour la paix, le socialisme et la fraternité entre les peuples.

Sa famille, ses amis, ses camarades lui rendront un hommage fraternel lundi 29 juillet à 10h30, au crématorium du Père Lachaise, salle de la Coupole. Le même jour à 16h, une courte cérémonie d’inhumation aura lieu au cimetière de Palaiseau (Essonne).

Contact : andre.et.jean.salem chez gmail.com

UN GRAND AMI DES PROGRESSISTES ALGÉRIENS

Avec la disparition d’Henri Alleg, les démocrates et progressistes algériens perdent un ami fidèle, voire un frère.

Paris, De notre correspondante

La torture à laquelle il sera soumis par le colonialisme et dont il témoignera avec précision et concision dans le magistral La Question, renforcera son engagement de communiste pour la justice et l’égalité des droits. Doux, timide et modeste, témoigneront unanimement tous ceux qui l’ont approché, Henri Alleg était intransigeant, sans concession ni compromis quand il s’agissait des valeurs qu’il défendait.

« Je n’ai commencé réellement ma vie d’homme et ma vie intellectuelle et politique qu’à mon arrivée en Algérie, en 1939. J’avais 18 ans et j’étais très passionné par la découverte du monde, avec des idées de gauche, entre guillemets un peu anarchisantes », nous affirmait-il dans un témoignage pour les besoins d’un spécial 40e anniversaire du déclenchement de la lutte de libération nationale (El Watan du 1er novembre 2004). « L’Algérie devait être une étape d’un voyage à travers le monde. Les circonstances ont fait que je suis resté… Je me suis lié, ce qui était, à l’époque, une chose exceptionnelle, avec des jeunes Algériens. Des Algériens qui, je ne le savais pas, je l’ai découvert après, étaient militants du PPA. Il y avait aussi des gens qui n’étaient pas du PPA, mais qui étaient sous son influence. Un de mes copains était Mustapha Kateb, l’ancien directeur du TNA ; à l’époque, il était postier. J’étais aussi ami avec Ali Tessah, un ouvrier. Un autre, Mohamed Boursas, était le fils d’un commerçant de La Casbah. C’est grâce à eux que j’ai ouvert les yeux sur la réalité coloniale.  » (op cit).

GILBERTE, COMPAGNE DE VIE ET DE COMBAT

Son combat, son engagement étaient partagés par son épouse Gilberte, disparue en avril 2011. Dans son ouvrage Mémoires algériennes, Henri Alleg raconte qu’il fit la connaissance de Gilberte Serfaty, native de Mostaganem, à l’agence de presse France-Afrique. C’était dans les années 1945. En application des lois antijuives de Vichy, sa soeur Andrée et elle sont exclues, l’une du lycée, l’autre de la faculté des lettres d’Alger. Toutes les deux adhèrent au Parti communiste algérien au cours d’une réunion à laquelle Henri les avait invitées.

Gilberte et Henri se marient en juin 1946. Ils participent ensemble au combat anticolonialiste, au sein du PCA ou dans les organisations populaires animées par les communistes, Gilberte à l’Union des femmes d’Algérie et Henri à l’Union de la jeunesse démocratique algérienne. Sanctionnée par son administration pour son action militante, Gilberte, qui était professeur d’anglais, quitte l’éducation nationale.

Après Novembre 1954, Henri est contraint, comme plusieurs autres militants du PCA, de rentrer dans la clandestinité pour échapper à une arrestation et poursuivre le combat anticolonialiste. Les deux enfants du couple, André et Jean, nés en 1946 et 1952, sont envoyés en France où des parents les recueillent pour que Gilberte puisse contribuer, elle aussi, à la lutte pour la libération de l’Algérie. Quand Henri est arrêté, le 12 juin 1957, Gilberte fait tout pour qu’il soit libéré. Son action lui vaut d’être expulsée en France où elle poursuit le combat pour sauver son époux. Elle l’aidera plus tard, vers la fin de la guerre d’Algérie, alors qu’il est emprisonné en France, à  s’évader de son lieu de détention. Au lendemain de l’indépendance de l’Algérie, elle obtient la nationalité algérienne pour sa participation à la guerre de Libération.

HENRI ALLEG ET ALGER RÉPUBLICAIN

« J’ai rejoint Alger républicain en 1950. Alger républicain, contrairement à l’idée commune, n’a pas toujours été ce journal qui, dès sa création, combattait pour l’indépendance de l’Algérie.

C’est un journal qui est né dans le sillage du Front populaire français et qui avait reçu l’appui, en Algérie, de démocrates et de syndicalistes européens, de gens qui étaient plus ou moins socialistes. Du côté des Algériens, il y avait des gens de la bourgeoisie, des commerçants qui comprenaient qu’il fallait pour l’Algérie un quotidien qui puisse faire échec à la propagande colonialiste raciste exacerbée, véhiculée par la presse locale. Alger républicain avait été connu parmi les Algériens pour son action au moment du procès de cheikh Tayeb El Oqbi, qui était le président du cercle du Progrès à Alger. On l’avait accusé d’avoir fourni de l’argent pour assassiner le mufti d’Alger. Alger républicain, par la plume d’Albert Camus, a défendu cheikh El Oqbi et a fait la démonstration que l’affaire était montée de toutes pièces par l’administration coloniale. El Oqbi a été acquitté. C’était une victoire formidable. Le changement s’est opéré à Alger républicain par la suite, avec la venue au journal de Boualem Khalfa, de moi-même et d’autres militants du PCA. Ensuite est venu Abdelhamid Benzine. Alger républicain, auparavant, même s’il avait des positions ouvertes, n’était pas un journal qui comprenait ou exposait le fond même de la question coloniale. Ainsi, pour Albert Camus, les Algériens devaient avoir les mêmes droits que les Français, mais il ne disait pas que les Algériens n’étaient pas des Français et qu’ils avaient le droit d’être maîtres de leur pays, avec leur République, leur drapeau. Il ne parlait pas du passé prestigieux de la civilisation arabe.

Pour Albert Camus, l’Algérie avait commencé en 1830. Même quand il parlait du passé de l’Algérie, il parlait des ruines de Tipasa ou de celles de Cherchell, mais entre les ruines de Tipasa et le débarquement à Sidi Ferruch, c’était comme s’il n’y avait rien eu. A partir de 1950,Alger républicain est devenu un vrai journal algérien, avec le souci de ne pas se couper de la population européenne, qui pouvait être amenée à comprendre que l’intérêt des Européens qui n’étaient pas des colonialistes, et de leurs enfants, s’ils voulaient rester en Algérie, c’était de se joindre aux Algériens exploités et dans la lutte même pour une autre Algérie, de revendiquer leur appartenance à l’Algérie. C’est ce que nous avons défendu. » (El Watan du 1er novembre 2004).

Nadjia Bouzeghrane

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